Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 57.djvu/578

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

yeux. Deux groupes de puissances ont été ainsi constitués en Europe et se font contrepoids. A l’inquiétude, à l’énervement d’une paix chaque jour menacée a succédé un sentiment de sécurité fondé sur l’équivalence des forces et qui pourrait, si les gouvernemens étaient habiles et si les peuples étaient sages, se changer en une confiance réciproque, propice à l’établissement d’une nouvelle vie internationale qui aurait ses organes communs et ses fonctions solidaires. Edouard VII a trouvé une Europe troublée et désunie ; il la laisse plus calme et mieux équilibrée. Ces grands effets, il ne les a pas obtenus en menant de sournoises intrigues derrière le dos de ses ministres ou en s’épanchant dans le sein des reporters. Tout ce qu’il a fait, il l’a fait au grand jour. Il n’a jamais formulé une promesse qu’il ne fût certain de tenir, ni pris aucun engagement sans s’être mis d’accord avec son gouvernement. Aussi l’homme qui lui a le mieux rendu justice est-il celui qui connaît le mieux ses actes. Sir Edward Grey, le chef du Foreign Office, disait au mois de mars 1909 :

« C’est une pratique universellement admise que le travail lu Roi en matière de politique étrangère se fera par le Foreign Office, uniquement et exclusivement par le Foreign Office. Qu’il me soit permis de dire qu’aucun souverain n’a observé cette règle constitutionnelle plus fidèlement, plus religieusement que le Roi actuel. Je sais qu’il en est ainsi pour le Foreign Office, et je suis persuadé qu’il en est de même pour les autres départemens. Les visites du Roi aux cours et aux nations étrangères ont été précieuses pour la politique britannique. Elles ont été précieuses parce que le Roi possède en lui un don spécial qui n’a, je crois, jamais été surpassé, d’inspirer aux gouvernemens et aux peuples parmi lesquels il se rend l’impression du bon vouloir et des bonnes dispositions du peuple anglais. »

Lord Lansdowne, le prédécesseur de sir Edward Grey au Foreign Office, et tous les hommes d’Etat, anglais ou étrangers, qui ont eu l’honneur de traiter des affaires publiques avec Edouard VII, souscriront de grand cœur à cet éloge qui lui assure une place à part parmi les souverains diplomates.


IV

En ce qui touche la politique intérieure, la Constitution anglaise ou, plutôt, l’ensemble de précédens qui forme la Coutume