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qui le sont. Si on les fait disparaître, tout sera pour le mieux.

La déclaration a été accueillie avec quelque froideur au Sénat, et par des mouvemens opposés et confus à la Chambre ; mais il n’en faut tirer aucune conséquence contre le gouvernement. Nous avons entendu beaucoup de déclarations ministérielles, et presque aucune n’a soulevé de l’enthousiasme. C’est un genre oratoire un peu banal, un peu faux, un peu vain. La discussion qui viendra ensuite aura plus d’intérêt parce qu’on y entendra des orateurs qui parleront en sens divers et que les partis commenceront alors à se dessiner dans l’Assemblée. Cependant, ce ne seront encore là que des paroles, et M. Briand est trop habile pour en prononcer d’imprudentes. Nous serions surpris s’il n’obtenait pas, comme entrée de jeu, un vote de confiance, et, en vérité, il y a droit. C’est à l’œuvre même, aux actes, aux réalisations annoncées, qu’il faudra le juger. Ce qu’on a le droit d’attendre et même d’exiger de lui, c’est qu’il sorte des nuages dont sa déclaration reste en partie enveloppée. Le plus sûr moyen de ne contenter personne est de vouloir contenter tout le monde. M. Briand a pu voir que, dès le premier jour, les socialistes unifiés ont ouvert contre lui les hostilités, et il sait fort bien qu’une partie des radicaux ne voudra à aucun prix rompre avec les unifiés : la Chambre actuelle n’aurait plus aucune ressemblance avec la précédente s’il en était autrement. Ce sont là des points fixes relativement auxquels il faut prendre position, en dehors de tout ostracisme, comme dit la Déclaration ministérielle, mais en acceptant les limites naturelles de sa majorité : car s’il est vrai que qui ne sait se borner ne sut jamais écrire, il ne l’est pas moins que qui ne sait se limiter ne saura jamais gouverner.


Le Parlement anglais vient de reprendre ses travaux interrompus. La session sera courte ; elle doit se terminer à la fin de juillet. On se demandait quel en serait le caractère : serait-ce la paix qui prévaudrait ? serait-ce la guerre ? Si le sujet n’avait pas été aussi sérieux, les Anglais auraient pu se livrer à ce jeu des paris qui leur est familier, si, en vérité, il aurait été difficile de démêler les chances respectives les hypothèses en présence. Après la mort d’Edouard VII, le bruit avait couru que, peut-être, les deux partis concluraient une trêve de quelques mois, afin de ne pas mettre George V, à peine monté sur le trône, aux prises avec des difficultés presque inextricables. C’était un acte de loyalisme, de ménager les débuts du règne et de donner au nouveau souverain le temps de réfléchir avant de se déterminer.