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Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 58.djvu/517

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biens temporels et dans la puissance séculière, et tu es devenue coupable de fornication en accordant à la faveur et à l’argent ce qui n’était dû qu’à la vertu… Voici, dit le Seigneur, que je te livrerai à ceux qui te haïssent ; ils détruiront les lieux que tu as souillés de ton infamie, c’est-à-dire où tu commettais injustices et simonies. Ils te dépouilleront des vêtemens de ta gloire et te laisseront pleine d’ignominie. »

Comme Jeanne d’Arc était née, les premières lueurs des temps nouveaux se levèrent sur la chrétienté. Mais, parmi quels orages et sur quels horizons chargés de ténèbres ! Le Concile de Constance fut convoqué, pour l’année 1414, par un des trois papes, Jean XXIII.

La soif universelle de voir le schisme prendre fin lui avait imposé cette mesure ; les trois papes paraissaient entrer dans les voies de la démission simultanée, ou, comme on disait, de la cession volontaire, pour permettre au concile d’élire un nouveau pontife. Mais chacun d’eux ne voulait céder qu’à la condition d’avoir la certitude d’être maintenu comme seul Pape légitime. Il y eut, entre les trois rivaux et leurs obédiences, une lutte dont les incidens, colportés de bouche en bouche, dans un monde ballotté, d’ailleurs, entre les mêmes divisions et les mêmes partialités, n’inspiraient plus partout que l’appréhension, la douleur et l’horreur.

Il fallut que le concile procédât par la voie de contrainte. Et quel retentissement, encore, les mesures qu’il prit eurent-elles dans les âmes des fidèles, quand on sut que le corps immense des prélats, prêtres, docteurs et clercs, réunis à Constance, faisait le procès au pape Jean XXIII et qu’ils portaient, contre lui, les incriminations suivantes, finalement avouées par l’accusé : « Dès son enfance, il a été sans docilité, sans pudeur, sans bonne foi, sans respect pour ses parens. Il s’est rendu habile en toute espèce de simonie pour avancer dans les dignités ecclésiastiques. Dans les légations, il a été le fléau des peuples qu’il avait sous son autorité… Pendant le temps qu’il a été pape, il n’a accompli aucun de ses devoirs ; il n’a ni jeûné, ni récité l’office divin, ni observé les jours d’abstinence. Il a été l’exploiteur du pauvre, l’ennemi de la justice, un véritable marchand de bénéfices, de reliques et de sacremens, un dissipateur des biens de l’Eglise Romaine, un empoisonneur, un homicide, un parjure, un fauteur de schisme. Il n’a respecté ni la pudeur des vierges,