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Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 58.djvu/852

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THÉOPHILE DE VIAU

La Société du Mercure de France publie, avec une notice excellente, et qui n’a d’autres défaut que d’être trop courte, de M. Rémy de Gourmont, des morceaux choisis de Théophile de Viau.

Je le regrette presque ; car les œuvres complètes de « Théophile » ne sont pas si longues ; elles sont en deux volumes de médiocre épaisseur dans la Bibliothèque elzévirienne, et j’ai peur que la plaquette du Mercure de France ne favorise la paresse du public et ne le détourne de lire Théophile au complet. Or Théophile est absolument digne d’être lu en son entier. « Connaissez-vous le sonnet d’Arvers ? — J’en ai lu des passages. » Voilà où mènent les morceaux choisis. Enfin l’intention est bonne, et il faut songer à ceux, aussi, qui, manque des morceaux choisis du Mercure de France, n’auraient rien lu de Théophile. Soit.

Théophile de Viau ou de Viaud, qui, de son temps même, était appelé couramment Théophile, et qui signait ainsi lui-même ses lettres et ses préfaces, était né en 1590 à Clairac en Agénois (Lot-et-Garonne). On l’accusait d’être plébéien, très plébéien, fils d’un cabaretier, comme plus tard Rivarol. Il assurait, — et maintenant c’est à peu près prouvé, — qu’il était noble, fils d’un jurisconsulte et petit-fils d’un secrétaire de la reine de Navarre. Les Viau-Bellegarde actuels ont de bonnes raisons de croire qu’ils sont les descendans de la sœur de Théophile, Mme de Bellegarde.

Il vint à vingt ans à Paris chercher fortune, en bon cadet de Gascogne, et y arriva tout juste dans le temps de la mort d’Henri IV. Il y mena, de son propre aveu, une vie très dissipée. Cependant il ne laissa pas de lier amitié avec un jeune homme