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Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 58.djvu/896

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reproduire. » Par l’analyse technique, très détaillée et très attentive, que fait, ensuite, le savant archéologue, des parties anciennes de ces édifices, il y retrouve, en effet, nombre de motifs courans dans les églises provençales du XIIIe siècle.

Du vivant même de François, cette influence septentrionale dite plus tard, par dérision et mépris, « gothique, » put donc se révéler déjà, au moins pour quelques détails, dans les premiers établissemens, très humbles, des Frères Mineurs, disséminés çà et là. Presque rien, aujourd’hui, ne subsiste de ces abris, modestes et provisoires, tôt ou tard remplacés, aux XIIIe et XIVe siècles, par des constructions plus vastes et mieux ornées. Mais, après la canonisation du Saint et l’édification de sa Basilique, c’est, de tous côtés, avec une rapidité merveilleuse, que s’élèvent, soit en son honneur, soit en celui de saint Dominique, par une émulation passionnée des congrégations, des populations, des pouvoirs publics, démocratiques ou seigneuriaux, les églises nouvelles, grandes ou petites. Or, presque toutes sont conçues ou décorées dans le goût nouveau qui gagne à la fois clercs et laïques et se manifeste par contagion, dans les monumens civils et profanes, autant que dans les constructions ecclésiastiques.

Les Dominicains, dans cette concurrence, mieux organisés, recrutés d’ordinaire en des milieux plus cultivés, ne se laissent point devancer par les Franciscains. Depuis l’accolade fraternelle que leurs deux fondateurs s’étaient donnée à Rome, sur le parvis de Saint-Pierre, au sortir de l’audience pontificale où l’aîné, Dominique, le docteur militant, s’était senti touché, dépassé, vaincu par la foi simple et chaleureuse du jeune et naïf rêveur, le petit pauvre François, c’est dans un sincère accord qu’ils avaient tous deux travaillé, sous l’œil vigilant de Rome, à la reconstruction de la vieille Eglise chancelante. L’émulation entre leurs disciples, les prêcheurs et les mendians, continuera, visiblement et officiellement, durant plusieurs siècles, non sans quelques troubles passagers de jalousies et de taquineries qu’expliquent de reste les diversités d’occupations, habitudes et tendances. Néanmoins, au fond, l’accord moral et intellectuel répond trop à des nécessités sociales et religieuses pour qu’il soit jamais sérieusement compromis. On verra donc, non sans surprise, que si l’inspiration de nature et de vérité qui va ranimer, transformer, développer tous les arts, reste