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Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 59.djvu/181

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Rencontre d’Abraham et de Melchisédec prêtée par le musée de Caen) et celui des peintures historiques et mythologiques (de ce dernier nous aurions encore dû citer le beau tableau du baron de Schlichting, Ixion trompé par Junon, peint vers 1610 et d’une si jolie teinte blonde). Le peintre de genre et de paysages n’est guère représenté, non plus que le peintre des chasses héroïques. En revanche, le portraitiste se manifeste de manière souveraine et nous introduit, par étapes, dans l’intimité de son existence prodigieuse. Voici le buste d’Isabelle Brandt (collection Porgès), sa première femme, qu’il jugeait ainsi dans une lettre à Pierre Dupuy : « J’ai perdu une excellente compagne qu’on pouvait ou plutôt qu’on devait aimer, car elle n’avait aucun des défauts propres à son sexe ; vivante, on l’aimait pour ses vertus ; morte, elle est regrettée de tous. « Voici le profil tout à fait remarquable de son grand ami Nicolas Rockox, le bourgmestre d’Anvers qui, en qualité de chef-homme des Arquebusiers, commanda la Descente de Croix ; (ce portrait appartient à M. Ch. L. Cardon, le grand collectionneur bruxellois à qui incomba la tâche délicate d’ordonner les tableaux dans les salles) ; voici le confesseur du maître, le moine Ophovius (Mauritshuis), visage de bonté largement peint ; puis Anne d’Autriche, morceau de grande distinction envoyé par M. Pierpont-Morgan, et Suzanne Fourment (collection Franck Ghauveau), la célèbre personne au Chapeau de paille, en qui la légende veut voir l’amie du peintre, celle qui devait le consoler de la perte d’Isabelle Brandt, mais à laquelle il préféra finalement sa sœur cadette Hélène. Si l’exposition ne rassemblait que les morceaux ci-dessus, nous pourrions donner raison à Fromentin : « Ses portraits sont faibles, peu observés, superficiellement construits, et partant de ressemblance vague. Quand on le compare à Titien, Rembrandt, Raphaël, Sébastien del Piombo, Velazquez, van Dyck, Holbein, Antoine More, — j’épuiserais la liste des plus divers et des plus grands, et je descendrais de plusieurs degrés jusqu’à Philippe de Champaigne au XVIIe siècle, — on s’aperçoit que Rubens manquait de cette naïveté attentive, soumise et forte, qu’exige, pour être parfaite, l’étude du visage humain. » Mais on a pu réunir le portrait d’Hélène Fourment du Rycksmuseum d’Amsterdam, que Fromentin avait sans doute mal regardé, le Ferdinand d’Autriche de la collection Pierpont-Morgan, et le Rubens âgé du musée impérial de Vienne, que l’auteur des Maîtres d’autrefois ne