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richement vêtu de vert et d’or ? ai-je dit la splendeur contenue de cette toile et la valeur d’une facture encore impétueuse étalant sans reprises les larges coulées, au risque de laisser apparaître le grain de la toile ? — van Dyck pouvait prétendre à devenir le portraitiste international de toutes les aristocraties. Il le fut dès son arrivée en Italie en 1623.

Quelques beaux portraits racontent son fastueux passage à Gênes : un Cavalier (collection Agnew) très parent par l’allure et le geste du Marquis de Brignole conservé au palais Bosso, les Frères de Wael (musée du Capitole), si naturels qu’on les croirait prêts à se mêler aux curieux venus pour admirer les œuvres de leur ami van Dyck, une belle réplique du portrait présumé de la Marquise Polixena (M. Kleinberger), et enfin, la haute, fine et brillante figure de la jeune Marquise Spinola (M. Pierpont-Morgan) engainée dans une toilette de soie pourpre, ayant à ses côtés un délicieux fanciullo en satin bleu sombre avec galons d’or. Devant le Groupe de l’Ermitage, les partisans de Corneille de Vos prétendent que van Dyck n’avait jamais peint un enfant aussi remuant ; en effet, le jeune Flamand rebondi du tableau de l’Ermitage est moins tranquille que le rejeton des Spinola dans le tableau de M. Pierpont-Morgan ; mais tous deux ont une main droite identique de dessin, de modelé, d’esprit. Quand il s’agit du « peintre des mains, » cela vaut une signature. — Ces portraits italiens sont tous d’une exécution rapide et d’une matière très mince ; c’est au Titien sans doute que van Dyck emprunte cette facture lisse. Quelques-uns de ces portraits ont pris malheureusement un aspect bitumeux (les Frères de Wael notamment) où perce l’influence de l’Italie contemporaine éprise des grandes taches brunes et des ombres violentes de l’école napolitaine. La pâte se raffermira, le clair-obscur s’assouplira dès le retour du maître à Anvers.

Une dizaine d’œuvres remarquables nous permettent d’étudier la facture extrêmement sérieuse de van Dyck pendant les nouvelles années flamandes de 1627 à 1632 : les portraits de Pierre Stevens et de sa femme Lady Wake (Mauritshuis), le bourgmestre van der Borght (Rycksmuseum), le peintre Franck (même musée), le peintre Crayer (Liechtenstein), le peintre Marlyn Pepyn (musée d’Anvers), le graveur Pontius (collection Schloss), le Jésuite della Faille (collection délia Faille), etc. Jamais peut-être van Dyck ne fut plus appliqué que pendant cette période ;