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Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 59.djvu/441

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déclarent satisfaits avec 0 fr. 60 pour 12 heures de travail, où les bourjanes des transports ne gagnent que 0 fr. 75 par journée d’une besogne à laquelle les chevaux d’omnibus parisiens ne suffiraient pas, où l’importation des étoffes de flanelle et de drap indispensables dans un pays à saison froide est nulle, ne peut être qu’une population misérable chez qui le besoin de recueillir à tout prix la somme nécessaire au paiement de l’impôt prime toute autre préoccupation.

Mais, engourdis par la routine et l’ignorance, les Malgaches paraissent peu capables d’améliorer leur sort. C’est en vain qu’on a multiplié les formations sanitaires, que des médecins français ou indigènes effectuent de nombreuses tournées, donnent des conseils, distribuent des médicamens. Le fonctionnement de l’assistance médicale n’est pas exempt de critiques, surtout dans les provinces éloignées de la capitale ; la science des médecins hovas est trop rudimentaire, malgré d’authentiques diplômes, et l’œuvre ne rend guère de services que dans les centres importans. Dans les campagnes, le sorcier est encore tout-puissant et son influence est néfaste ; elle a toujours pour conséquences les migrations de villages et la suppression d’enfans nés aux jours de mauvais augure. Les arts et métiers sont restés à l’état primitif. L’école professionnelle inaugurée à Tananarive par le général Galliéni a dû être fermée par son successeur, car elle ne rendait pas de services en rapport avec les dépenses qu’elle causait. Les ouvriers d’art qu’on rencontre dans les villes ont appris de leurs pères les procédés rudimentaires que Jean Laborde leur enseigna. Les élèves qui suivent les cours professionnels annexés à leurs écoles par les missionnaires catholiques et protestans se hâtent d’oublier leur savoir-faire dès qu’ils sont émancipés.

En agriculture, nous voyons les Malgaches aussi négligens ou routiniers. Malgré les conseils et les exemples, ils ignorent les engrais, les assolemens, la sélection du bétail. Ils se refusent obstinément à l’emploi des machines agricoles, et les charrues françaises qu’on leur distribua pendant les premières années de l’occupation pourrissent sans emploi sous les décombres des fermes-modèles abandonnées. Seul, l’enseignement maraîcher, pratiqué par les Frères des Ecoles chrétiennes et les Jésuites aux environs de Tananarive et par les chefs des postes militaires ou administratifs, a donné quelques résultats dont il ne faut pas d’ailleurs exagérer l’importance. L’extension des cultures, que