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Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 60.djvu/100

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exécutif avaient bien mérité de la patrie. Le président Jules Grévy fit remarquer et l’unanimité du vote et l’unanimité des sentimens de l’Assemblée. Croit-on que si M. Thiers avait, dans la douloureuse négociation de l’échange des otages, montré la duplicité que certains lui attribuent, tous les représentans se seraient associés dans ce vote, « qui, a-t-il dit lui-même, a été la plus grande récompense qu’il ait reçue de sa vie ? »

Le 24 mai, à la nouvelle des incendies épouvantables de la capitale et des excès atroces de la Commune agonisante, il priait l’Assemblée de conserver son sang-froid et promettait encore une fois de punir les coupables suivant les lois, avec les lois et par les lois. Le 26 mai, dans un émouvant rapport, M. Wallon concluant à la reconstruction de la maison de M. Thiers demandée par le comte Jaubert, Depeyre, le comte de Mornay, Baragnon et de nombreux représentans, disait : « On connaissait la haine des insurgés pour l’homme qui les combattait avec la ferme résolution de les vaincre. La destruction de la Colonne était un attentat à la gloire nationale ; la destruction de la maison de M. Thiers était un outrage à la souveraineté nationale, car c’est comme chef du pouvoir exécutif que M. Thiers était frappé dans sa maison. Ainsi, cette Commune, qui prétendait asseoir le monde sur des bases nouvelles, n’aura fait que renverser. Tel arbre, tel fruit : des doctrines qui ont pour principe premier le néant, ne peuvent aboutir qu’à la destruction. » L’orateur ajoutait que M. Thiers eût été trop heureux « si, au prix de son foyer domestique dévasté, il avait pu payer la rançon de tant d’humbles foyers que la démagogie, en succombant dans Paris, s’est donné la joie infernale de livrer aux flammes, comme pour témoigner à jamais devant le monde qu’elle est l’ennemie mortelle de la civilisation. » La proposition fut votée à l’unanimité par l’Assemblée qui revendiquait cette satisfaction en face de la France, pour sa souveraineté outragée dans la personne de son premier délégué.

Deux jours après on apprit par le général Le Flô, ministre de la Guerre, l’exécution des otages, et ce fut un deuil national. Jusque-là, tout le monde avait cru à la possibilité de leur salut et la veille même, le frère de Mgr Darboy mandait à l’un de ses parens : « Mon frère est délivré. — Officiel. » M. Thiers manda aussitôt aux préfets et à toutes les autorités : « En entrant dans la Roquette, nous avons eu la consolation de