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Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 60.djvu/483

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et fédérations de syndicats devront être organisées de telle sorte que, conformément à leur destination légale, elles soient une représentation exacte et fidèle des travailleurs. » Ici encore, attendons les projets de loi annoncés, avec l’espoir qu’ils interdiront les associations entre des syndicats de professions diverses. Grâce au silence de la loi de 1884 sur ce point, ces associations de syndicats divers sont devenues nombreuses et la Confédération générale du travail, la fameuse C. G. T. est en quelque sorte, la quintessence concentrée de ces associations. Elle exerce en effet sur les professions les plus variées un empire dont elle étend de plus en plus les limites à mesure que des syndicats nouveaux viennent, comme des vassaux, se ranger sous sa suzeraineté.

Enfin la Déclaration ministérielle en vient au point essentiel, à celui qui préoccupe le plus l’opinion à la suite de la grève des cheminots : cette grève était-elle légale ? Les uns disent oui, et on sait que cette opinion a été soutenue un jour à la tribune du Sénat par M. Barthou, appuyé par M. Clemenceau ; les autres disent non. Laissons la question incertaine dans le passé, pourvu qu’elle ne le soit plus dans l’avenir. « Il importe, dit la Déclaration ministérielle, aussi bien dans l’intérêt de la nation que dans celui des travailleurs, que cette grave question reçoive une solution franche, nette, exempte de toute équivoque. » Rien n’importe plus, en effet, et nous aurions désiré que la Déclaration promît formellement le prochain dépôt d’un projet de loi qui interdirait aux employés et aux ouvriers d’un certain nombre de services publics l’exercice du droit de grève. Elle le fait entendre plus encore qu’elle ne le dit, mais, en somme, elle le fait entendre assez clairement : « Est-il admissible, demande-t-elle, que les intérêts particuliers d’une corporation, si dignes de sollicitude qu’ils puissent être, se dressent contre l’intérêt général et le prennent en otage ? Est-il admissible que, dans l’espoir d’assurer le succès de leurs revendications, les agens qui ont assumé librement la charge d’un service public et qui, à ce titre, bénéficient d’avantages spéciaux, désertent ce service et en arrêtent le fonctionnement au détriment de l’ensemble des citoyens, qu’ainsi et par contre-coup ils paralysent la vie nationale, et que même ils risquent de mettre en danger la patrie en laissant ses frontières ouvertes, dépourvues de moyens de défense ? C’est une éventualité à laquelle, pour notre part, nous ne nous résoudrons pas. » Voilà qui est au mieux, mais que faire pour prévenir cette éventualité redoutable ? On a proposé « d’établir entre la direction des services et les ouvriers ou employés des contacts