Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 60.djvu/597

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Nous avons décrit ailleurs les causes de la désaffection de nombre de fonctionnaires et les griefs légitimes qu’ils entretiennent contre le gouvernement[1]. Les inadmissibles procédés des administrations publiques envers leurs agens devaient porter ceux-ci à se concerter pour défendre leur situation et leurs droits.

Il suffit de rappeler les difficultés que suscitèrent les fédérations des « Amicales » d’instituteurs. Au mois d’avril 1908, un acte tout à fait grave se produisait : le Congrès des P. T. T. composé des sous-agens des postes, télégraphes et téléphones, c’est-à-dire des facteurs et employés inférieurs, après une longue discussion votait un ordre du jour décidant en principe son adhésion à la Confédération générale du Travail et chargeait les membres du Conseil syndical des P. T. T. de faire en ce sens le nécessaire. Voici comment il motivait cette résolution :


Le Congrès du Syndicat national des sous-agens des postes, télégraphes et téléphones,

Considérant que la Confédération générale du Travail est l’expression vivante et agissante de la solidarité prolétarienne ;

Qu’elle est actuellement le trait d’union indispensable entre toutes les organisations syndicales ;

Qu’aucune organisation consciente de ses devoirs de solidarité ne doit rester en dehors de la Confédération générale du Travail ;

Considérant, d’autre part, que les sous-agens des P. T. T. salariés de l’État ont, comme tous les autres salariés, des revendications à présenter à leur employeur, l’État patron ;

Qu’ils ne sauraient confirmer la thèse gouvernementale qui dresse une barrière entre le prolétariat administratif et le salariat de l’industrie privée ;

Qu’en adhérant à la Confédération générale du Travail, ils accomplissent leur devoir de solidarité ouvrière ;

Que les syndicats ouvriers ont, en toute occasion, appuyé et encouragé les revendications des salariés de l’État,

Déclarent adhérer à la Confédération générale du Travail.


C’était là un acte des plus graves : les employés du gouvernement passaient ainsi, toutes enseignes déployées, à une association manifestement révolutionnaire. Le gouvernement ne prit aucune mesure sérieuse pour s’y opposer. Il eût pu

  1. Voyez dans la Revue des Deux Mondes du 1er août 1908 notre article intitulé : le Syndicalisme ; la Confédération générale du Travail ; la Théorie de la violence et également notre ouvrage : le Collectivisme ; l’Évolution du Socialisme depuis 1895 ; le Syndicalisme.