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exposait, avec une connaissance approfondie des événement et des hommes qui s’y trouvèrent mêlés, l’histoire du mouvement révolutionnaire moldo-valaque[1]. Grâce à toutes ces sympathies, les idées chères aux patriotes roumains gagnèrent rapidement du terrain. Alecsandri, qui, après avoir été impliqué dans l’échauffourée de Iassi, avait dû, comme beaucoup de ses compatriotes, chercher un asile à l’étranger, profita du séjour prolongé qu’il fit à Paris, au lendemain de la Révolution roumaine de 1848, pour créer à sa patrie des appuis solides et des amitiés fidèles. Ses Doïnas, publiées, comme on l’a vu, à Paris même, en 1853, ses Chants populaires, traduits en 1855, contribuèrent à mieux faire connaître aux Français un peuple qui n’était pas indigne de fixer leur attention. De leur côté, les Roumains, surtout depuis le début de la guerre de Grimée, avaient tourné anxieusement leurs regards vers la France, sentant que d’elle seule pouvait venir le salut. Aussi fut-ce chez eux un véritable cri de soulagement et d’espérance lorsqu’en 1855, le baron de Bourqueney posa devant la Conférence de Vienne, au nom du gouvernement impérial, la question de l’union des Principautés sous un prince étranger, choisi, avec droit d’hérédité, dans une des familles souveraines de l’Europe. C’est de ce jour que date la sincère reconnaissance de la Roumanie pour la France ; car c’est grâce à sa généreuse initiative et à son appui désintéressé que les Principautés ont pu avoir, en 1859, l’union, et, en 1866, le prince étranger.


V

Les services rendus par Alecsandri à la cause roumaine, les relations influentes qu’il s’était créées à l’étranger, ses qualités de finesse et de tact jointes à la distinction et à l’affabilité de ses manières, enfin l’étroite amitié qui l’unissait depuis l’enfance au prince Couza le désignèrent tout naturellement au choix du nouvel élu de la nation roumaine lorsque celui-ci dut notifier aux Puissances signataires du traité de Paris sa double élection aux trônes de Moldavie et de Valachie.

La mission confiée à Alecsandri, pour flatteuse qu’elle pût paraître, n’en était pas moins délicate. La Convention de Paris,

  1. Revue des Deux Mondes, 1848 à 1850.