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intention de défendre. Les sentimens de M. Lloyd George à l’égard de la Chambre des Lords ne sont vraisemblablement pas ceux de tous ses collègues du Cabinet, et encore moins ceux du pays, mais ces sentimens et surtout la manière dont l’orateur les exprime nous font entrevoir une Angleterre nouvelle, qui ressemble peu à celle du passé. Où va-t-elle et quel est son avenir ? Nous n’en savons rien. Tant de nouveautés nous déroutent. Il est impossible d’émettre les moindres pronostics au sujet des élections prochaines. L’effort de la Chambre des Lords pendant ces derniers jours a eu du moins pour objet de rendre ces élections plus claires. Si elles avaient eu lieu sans répit et sans débat, comme l’aurait voulu le ministère, on se serait battu dans les ténèbres, et les libéraux auraient eu beau jeu pour accuser les Lords de prétentions arrogantes et intransigeantes : c’est un grief qu’on ne saurait articuler contre eux aujourd’hui. Les deux programmes opposés sont connus désormais. Le gouvernement dit : Pas de réforme de la Chambre des Lords ; modifier son origine serait la fortifier ; il faut la laisser à son archaïsme pour la déclarer incapable et lui enlever tous ses pouvoirs. — La Chambre des Lords dit au contraire : Je demande à devenir élective et renouvelable et j’abandonne une partie de mes pouvoirs pour conserver le reste. — Au pays de choisir, puisqu’on fait appel à son jugement. Il pourra du moins se prononcer en connaissance de cause. Quant à nous, nous n’avons pas de préférence à exprimer. Les deux partis en Angleterre sont également amis de la France ; ils pratiquent à notre égard la même politique. Que ce soit sir Ed. Grey ou lord Lansdowne qui dirige les Affaires étrangères, cette direction reste immuable, et par conséquent nos sympathies restent indivises. Les destinées intérieures de l’Angleterre sont ici seules en jeu ; mais, même ramenée à ces termes, la question est assez haute pour intéresser l’humanité tout entière, et nous moins que personne, qui sommes les amis de l’Angleterre, ne saurions y être indifférens.


FRANCIS CHARMES.


Le Directeur-Gérant,

FRANCIS CHARMES.