Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 60.djvu/736

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

désormais, pour l’armée qui donne les vrais titres de noblesse, Bourbaki d’Inkermann. Il prit part, à la guerre d’Italie comme chef de division : le 19 juillet 1859, il fut nommé commandant de la Garde impériale. Dévoué sans conditions à l’Empereur et surtout à l’Impératrice, auprès de laquelle sa sœur, Mme Le Breton, remplissait l’office de dame de compagnie, d’une droiture chevaleresque d’où l’esprit n’était pas exclu, d’une crânerie d’audace à étourdir, peu friand de théorie, connaissant à merveille la pratique de son art, il pensait que le travail abrutit un officier, mais si on lui avait commandé de faire monter une compagnie sur le toit d’une maison, il aurait trouvé le moyen de l’y conduire. Envoyé en 1864 à Berlin par Randon pour assister aux grandes manœuvres d’automne, il acquit là une connaissance de l’armée prussienne qui donnait beaucoup de crédit à ses pronostics de succès ; plus que personne il contribua à inspirer, à l’Impératrice cette confiance en notre armée qui l’avait rendue favorable au parti de la guerre.

Ladmirault était issu d’une famille militaire et terrienne, fixée en Poitou par la capitainerie héréditaire de Montmorillon, ayant fourni une série ininterrompue d’officiers aux armées royales. Son père était à l’armée de Condé. Il fut façonné au métier au Collège des fils de Chevaliers de Saint-Louis, puis à Saint-Cyr. Sa carrière avait été modestement brillante. Il resta vingt-deux années en Algérie. Général de division en 1853, commandant la deuxième division du premier corps de l’armée d’Italie en 1859, il avait été deux fois grièvement blessé. Renversé de cheval, il se relève, se laisse emmener à l’ambulance établie à quatre pas du champ de bataille, sous le feu de l’ennemi. Mais là il refuse tous soins. Appuyé contre le tertre qui porte le fanion, les yeux sur les Autrichiens et sur sa division qui combat, il est tout entier aux mouvemens qu’il a conçus et ordonnés, il ne songe à sa blessure que lorsque ses régimens ont couronné les hauteurs et fait flotter le drapeau français sur les positions qu’occupaient les Autrichiens. En 1863, on lui donna le commandement de la division des grenadiers de la Garde, en 1865, le sous-gouvernement de l’Algérie, en 1867, le grand commandement de Lille. Il obtint cet avancement par son seul mérite, car il n’était pas inféodé à l’Empire.

Sa stature était haute et massive, donnant l’idée de la solidité. Son visage, animé par un œil clair et doux, « reflétait son