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Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 60.djvu/80

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influence sur son parti et qu’il exerçait un prestige singulier sur les hommes qui l’approchaient. « Ceux qui étaient mis en rapport avec lui, a-t-il affirmé, ou le fuyaient bientôt, ou bien lui restaient passionnément fidèles. Peut-être serait-il plus juste de dire de ces derniers qu’ils tenaient moins à la personne de Blanqui qu’à sa manière de comprendre l’action révolutionnaire. » Il est certain que ceux qui ont dit que sa présence n’eût rien ajouté aux forces de l’insurrection, ne le connaissaient pas. C’était le drapeau rouge lui-même, le drapeau de l’émeute, et c’eût été chose grave de permettre à ceux qui avaient déjà fait avec lui le 31 Octobre, de le montrer comme le symbole, comme la personnification de leurs redoutables desseins. Ses partisans en effet ne cachaient point qu’ils voulaient, même au prix des pires violences, la destruction entière de l’ordre et de la société. « Blanqui, disait l’ancien préfet de police Edmond Adam, continue le babouvisme. C’est le successeur de Babeuf. Il a conservé la direction des militans. Il exerce sur eux une grande influence et depuis beaucoup d’années commande nombre de conspirateurs. » M. Maxime Vuillaume qui l’a connu mieux que personne, en a dit lui-même : « Versailles, pas plus que nous, ne se méprenait sur la part immense du concours que Blanqui eût apportée à la Commune. » Celle-ci voulait donc avoir ce chef et elle usa de tous les moyens pour le tirer de sa prison et le ramener à Paris.

On comprend déjà, par cet exposé, pourquoi M. Thiers n’a pas voulu fournir cette arme nouvelle à une rébellion d’autant plus odieuse qu’elle avait éclaté sous les regards insolens et joyeux de l’étranger campé aux portes de la capitale.

Suivons maintenant de près l’étrange négociation qui devait aboutir, hélas ! au massacre des otages.

Le 4 avril, l’archevêque de Paris est arrêté. Le vicaire général, M. Lagarde, demande lui-même à suivre Mgr Darboy et à partager son sort. Raoul Rigault les reçoit brutalement à la Préfecture de police, signe leur ordre d’écrou et leur prédit qu’ils seront fusillés dans deux jours, parce que les Chouans massacrent ses frères. Le 5 avril, la Commune rend un décret par lequel il est dit que chaque exécution à Versailles d’un