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contre tous, un historien, A. Brachet, opposer à l’opinion concordante des médecins le diagnostic exclusif de : Confusion mentale.

En faveur de la manie, nous citerons seulement Audry (La Folie de Charles VI, Lyon, 1888), A. Chéreau (La maladie de Charles VI, Union médicale, 1862), Bird, en Allemagne (Allgemeine Zeitschrift für Psychiatrie, VI-512). Plus intéressante est l’opinion de Moreau de Tours et de Legrand du Saulle, qui ont introduit, dans le diagnostic de la maladie du Roi, la notion de folie périodique.

Dans son Traité de médecine légale, page 244, Legrand du Saulle cite Charles VI comme exemple, pour démontrer que, dans les intervalles lucides de certaines formes d’aliénation, la capacité testamentaire est intacte. « Pendant la maladie de Charles VI, dit-il, dès qu’il apparaissait un intervalle lucide, les pouvoirs du conseil de Régence étaient suspendus. En revenant ainsi à la santé et ressaisissant sa volonté, le Roi apaisait les discordes qui déchiraient sa famille, réparait bien des malheurs et relevait l’Etat que les désastres de la guerre entraînaient vers l’abîme. »

Moreau de Tours, dans son livre sur la Psychologie morbide, au chapitre des exemples historiques et à propos de l’hérédité de Louis XI, formule incidemment le diagnostic qu’il avait porté sur la maladie de Charles VI. Les faits historiques qu’il allègue sont contestables ou même certainement inexacts. On sait en effet combien est douteuse la parenté de Charles VI, fou et époux d’une reine débauchée, avec ses prétendus descendans, que les auteurs surnomment trop souvent, au mépris de la critique du témoignage : les enfans de la démence. De même, Moreau de Tours signale, comme facteurs écologiques de la folie du Roi, l’empoisonnement de son père Charles V, qui semble bien être mort de mort naturelle, et l’accident du bal des Ardens qui est, sans aucun doute, postérieur au début des troubles psychiques du monarque. Mais le nom donné à l’affection, présenté comme l’expression d’un diagnostic et imprimé en caractères italiques, est celui de « manie périodique. » C’est la première fois qu’on trouve ce diagnostic formulé d’une façon nette et complète.

Il convient de signaler encore cette incidente d’une phrase extraite du livre Fous et Bouffons : « En proie à une noire mélancolie,