Seule dans l’immense série des insectes, la larve de la cétoine marche sur le dos, bien que pourvue de pattes. Adaptation au milieu, dit-on. Mais alors, pourquoi cette faculté ne s’étend-elle pas aux autres larves, très nombreuses, vivant comme elle, dans l’humus ; à celle des hannetons par exemple ? Une théorie qui de deux cas similaires explique l’un sans pouvoir interpréter l’autre doit être tenue en médiocre estime. Donc il faut conclure que le milieu ne fait pas l’animal, c’est l’animal au contraire qui est fait pour le milieu. Affirmation d’une extrême importance, remarquons-le ; car, dans les rapports de l’animal avec le monde extérieur, dans leurs réactions mutuelles, elle donne le pas à la vie sur la matière, à l’être vivant sur les choses inertes.
Depuis Lamarck, on a invoqué l’usage et le non-usage, la fonction, comme cause de transformation de l’organe, et de l’espèce. Mais entre ces deux termes, fonction et organe, il n’y a pas relation de cause à effet, détermination réciproque. L’organe ne dépend pas de la fonction ; ni la fonction de l’organe.
D’abord, parce qu’il est facile de trouver des fonctions identiques accomplies avec des organes différens. C’est ainsi que chez quatre rouleurs de feuilles étudiés, l’outil ne décide pas du genre de travail, puisque avec des organes différens ils parviennent tous au même résultat : le rouleau. Cela prouve que l’instinct a son origine autre part que dans l’organe et qu’au lieu d’être asservi à l’outillage, il le domine, apte à l’employer tel quel. L’odynère alpestre, sans aucun rapport avec le genre anthidie, est aussi manipulateur de mastic. La guêpe et le bousier, avec des outils et des matériaux dissemblables, travaillent sur le même patron : la poire.
Ensuite, parce qu’une infinité d’exemples prouvent que des fonctions diverses sont accomplies avec des organes identiques, ce qui démontre que l’acte ne réagit pas sur la structure. Le coléoptère est en général d’une extrême ignorance dans les délicatesses de la nidification. Par exception, seuls les bousiers, qui en font partie morphologiquement, ont une admirable industrie d’éducateurs. Les anthidies qui travaillent l’ouate ont des outils : pattes et mandibules, conformes à celles des anthidies qui gâchent du mortier ou coupent des feuilles. Le genre est homogène organiquement ; il est hétérogène à fond industriellement. Le rhynchite du prunellier, identique aux autres rhynchites, ne roule