Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1910 - tome 60.djvu/917

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— J’ai donc prouvé jusqu’à la dernière évidence que dans Andromaque il n’y a pas trace d’amour d’Andromaque pour Hector et qu’il n’y a qu’une biche.

— Soit ; Racine, car il est probable d’après vous qu’Iphigénie a été écrit avant Andromaque, aura mis dans Andromaque la biche qu’il a retranchée d’Iphigénie.

— C’est cela même.

Voilà un des exemples des analyses de M. Masson-Forestier. Elles sont suggestives.

Aussi bien M. Masson-Forestier a des manières d’interpréter les textes qui surprennent toujours. On attribue à Racine cette épigramme mise dans la bouche de Mme de Main tenon parlant de Louis XIV :


Il eut peur de l’enfer, le lâche, et je fus reine.


M. Forestier rapproche ce vers de ceux de Bérénice :


Ah ! lâche, fais l’amour et renonce à l’Empire…
Vous êtes empereur, Seigneur, et vous pleurez.


Le rapport m’échappe.

Pyrrhus dit : « Moi l’aimer ! une ingrate qui me hait d’autant plus que mon amour la flatte, » et Oreste dit : « Et vous le haïssez ! Avouez-le, madame, l’amour n’est pas un feu qu’on renferme en son âme. » Et sur ces deux textes (que par parenthèse une erreur de transcription attribue tous deux à Pyrrhus ; mais il n’importe), M. Masson-Forestier dit : « Donc selon Racine l’amour exige de la haine quand il n’est pas partagé. » Pour le premier texte, c’est exact, avec cette restriction importante que ce n’est pas selon Racine, mais selon Pyrrhus, et qui se trompe sur lui-même, qu’il en est ainsi ; ’ et pour le second texte, il n’y a pas un mot de ce que M. Masson-Forestier dit ; il y a ceci qu’Hermione vient de laisser échapper un mot d’amour pour Pyrrhus, et qu’Oreste s’en est aperçu.

Hippolyte dit à Phèdre qui vient de lui faire l’aveu de son amour pour lui : « Oubliez-vous que Thésée est mon père et qu’il est votre époux ? » et Phèdre lui répond : « Et sur quoi jugez-vous que j’en perds la mémoire ? Ai-je perdu tout le soin de ma gloire ? » M. Masson-Forestier croit qu’elle « bondit, parce qu’Hippolyte n’a pas un rang comparable au sien. » Où voit-il cela ? « Gloire » durant tout le XVIIe siècle veut dire «