serait parvenu à sauver les otages ? Le parti qu’on appelle modéré était déjà à la merci du parti exalté et, un mois avant l’exécution, les aboyeurs de ce parti hurlaient à la mort. Le jour même de l’arrestation de Mgr Darboy, comme nous l’avons dit plus haut, Raoul Rigault lui avait prédit une exécution inexorable et prochaine. Comment se lier maintenant aux promesses d’un tel individu ? Mais la raison péremptoire du refus du chef du pouvoir exécutif, c’est que le Conseil des ministres et la Commission des Quinze n’avaient pas cru, à l’unanimité, pouvoir accepter l’échange proposé, parce qu’il était impossible de négocier avec des insurgés ; que la première concession en eût amené d’autres, et que le retour de Blanqui était une force nouvelle pour une insurrection dont la patrie, en face de l’étranger menaçant, voulait avoir raison au plus tôt.
Si l’on en croit les dires de B. Flotte, Raoul Rigault lui aurait fait, le 24 avril, cette confidence : « Ces fourbes de Versaillais jouent cet imbécile de Lagarde. Il n’obtiendra rien. Vois souvent Darboy et cherchez ensemble un moyen nouveau. Nous ne pouvons pas laisser Blanqui aux Versaillais. Il nous le faut quand même. Offre tous les otages, si cela est nécessaire. » Cette dernière proposition n’était vraiment pas sérieuse, et Raoul Rigault, si puissant qu’il fût dans la Commune, n’eût pas osé la faire. Peut-être s’agissait-il des trois Pères Jésuites qui furent massacrés avec les autres otages, le 24 mai, mais on ne parlait ni de Chaudey, ni de ceux qui furent égorgés rue Haxo, ni des municipaux et des gendarmes qui étaient détenus aussi à la Roquette. Ce qui prouve encore que M. Thiers n’était nullement décidé à faiblir en ce qui concerne Blanqui, c’est que la sœur de celui-ci ayant demandé à correspondre avec lui, le chef du pouvoir exécutif la rassura sur sa santé, mais déclara qu’il était impossible de lui adresser des lettres ou d’en recevoir avant la fin des hostilités[1]. Henri Cernuschi, ami intime de Blanqui, était venu à Versailles pour intercéder en sa faveur. Il n’obtint rien, pas plus que les autres négociateurs. Cependant, si l’on en croit Me Plou, Thiers « pour sauvegarder autant que possible
- ↑ Voyez Journal officiel de la Commune, 27 avril 1871.