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de chêne, ornée d’une plaque de cuivre où sont gravés ces mots : Eure—1893.

« Le travail terminé, la compagnie de débarquement se rangea au pied du mât de pavillon, présentant les armes, baïonnette au canon. Le clairon sonna au drapeau et le lieutenant de vaisseau Delzons, entouré des autres officiers, prit solennellement possession des îles Kerguelen au nom de la France, tandis que l’Eure appuyait le pavillon de vingt et un coups de canon. Quelques hommes de la goélette américaine, descendus à terre, étaient aussi présens.

« Dans le paysage pittoresque et imposant qui en formait le cadre extérieur, cette cérémonie, d’apparence si simple, avait un caractère de grandeur saisissant. »

Ainsi, l’acte, accompli par Boisguehenneu en 1772, par Rochegude en 1774, se trouva confirmé. Pour la troisième fois, les îles Kerguelen étaient proclamées possessions françaises.

Le 3 janvier, après de nouvelles rafales, l’Eure quitta la baie de l’Oiseau, prit au large de l’île Howe, puis pénétra dans la grande baie du centre (baie Hillsborough), dont l’un des fjords forme le port de la Gazelle. Après quelques excursions dans l’intérieur, le commandant Lieutard fit placer près de la pointe Duck, le 7 janvier, un pavillon semblable à celui qui avait été arboré dans la baie de l’Oiseau. Trois bouteilles contenant chacune un duplicata de la prise de possession furent enterrées au pied du mât et, non loin de ce lieu, dans une excavation naturelle, un dépôt de vivres et de vêtemens fut soigneusement établi[1].

Malgré l’attrait de ce havre, tranquille et sûr, égayé par un site ravissant, la mission dut reprendre la mer le surlendemain pour se rendre à Port-Mary sur la côte orientale de l’île Adalbert, dans la baie Rhodes. Les trois jours passés dans ce mauvais mouillage furent les derniers que le commandant consacra à notre archipel. Sa tâche était remplie. L’Eure profita de la première accalmie pour gagner le large et poursuivre sa route.

La prise de possession des Kerguelen, sans beaucoup occuper l’opinion publique, secoua quelque peu son indifférence.

  1. Aux terres de Kerguelen, p. 404 (le Tour du Monde, 21 août 1897).