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professionnel du Barreau ; la saisie du chaperon accompagne les peines d’interdiction prononcées contre l’avocat coupable. Dans les cérémonies officielles, l’Ordre est requis de se joindre aux magistrats. Son rang de préséance le place tout de suite après les gens du Roi. Au début du XVIe siècle, quand Louis XII épousa Marie d’Angleterre, le Parlement se rendit en corps et à cheval pour la recevoir : il avait été prescrit, en cette occasion, aux avocats de se réunir « honnêtement montés, vêtus de robes écarlates et chaperons fourrés, pour accompagner les dits présidens et conseillers. »

Si l’on regarde à la vie judiciaire de tous les jours, telle qu’elle se poursuivait à l’audience et au Palais, les preuves de l’union sont encore plus précises et plus significatives. La Grand’Chambre du Parlement a subsisté dans le Palais d’aujourd’hui, à peu près intacte : c’est la 1re  chambre du Tribunal, au fond et à droite de la salle des Pas-Perdus. On y retrouve les dispositions des murs, des fenêtres, que présentent les vieilles estampes, et les mêmes dimensions, sauf que la 1re  chambre a été diminuée dans sa profondeur pour fournir une chambre du conseil. Là se tenaient les lits de justice, se réunissait, aux jours solennels, le Parlement tout entier, et s’assemblait pour ses audiences ordinaires la Grand’Chambre, la plus considérable, celle qui jugeait les plus grands procès. Le premier président, les présidens, les conseillers siégeaient dans le prétoire, au fond : en face d’eux, les avocats plaidans occupaient les places à côté de la barre ; et auprès d’eux, sur des bancs fleurdelisés comme ceux de la Cour, les anciens du Barreau étaient conviés à s’asseoir, pour suivre le débat et donner aux juges leur avis sur les questions les plus graves. Ainsi, dans l’œuvre de justice, le Parlement avait la collaboration non seulement des avocats plaidans, mais encore de ces anciens qui écoutaient comme lui les plaidoyers et dont il recueillait l’opinion pour mieux former la sienne. L’association, ici, est complète, intime, affectueuse.

De là vint, sans doute, un usage qui contribua beaucoup à former la classe parlementaire : les avocats, si constamment liés aux magistrats, voyaient les premiers d’entre eux passer de la barre au siège ; le Barreau fournissait au Parlement conseillers, présidens de Chambre, premiers-présidens, procureurs généraux, et même au Roi ses chanceliers. Les tableaux de