Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 1.djvu/701

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Vous m’avez d’abord remercié, — pour la forme. Pour la forme aussi, vous m’avez dit que vous alliez rectifier chez l’éditeur. Mais certaine remarque amère de votre lettre sur les innéités différentes, source d’ennui pour la critique, me laissa rêveur…

Eh bien ! en 1911 vous n’avez pas encore rectifié ; et la douce et brune Mme Flaubert mère, toujours, symbolise, dans votre livre, les farouches Vikings à moustache blonde ! Vous vous en êtes tiré en décrétant que, désormais, les grands hommes qui s’aviseraient de se présenter avec un père et une mère très différens, seraient déclarés neutres, et leur âme qualifiée d’« âme du premier venu. »

Comme vous aviez déjà portraituré Chénier, Dumas père, Balzac, Heredia, Flaubert, Maupassant, ils ont, eux, gardé une innéité ; mais le pauvre Racine arrivant bon dernier en 1910 vous lui avez dit des choses pénibles : « Vous êtes neutre, Racine… Vous avez l’âme du premier venu (p. 917). »


* * *

Après Racine, ce fut mon tour.

— Comment, monsieur, de ce neutre, vous prétendez faire un beau tigre !… Eh bien ! je vais en dégoûter le lecteur, de votre tigre. Je vais lui raconter que vous répétez cent fois : « Racine est un tigre. »

Or je ne l’avais pas dit une seule fois, — mais je louais Leconte de Liste de l’avoir dit, et Jules Lemaître d’en avoir été bien près (avec son « Racine féroce »).

Ah ! Jules Lemaître, comme il connaît Racine !… Il sait que Phèdre (acte IV, sc. 6), folle d’amour pour cet Hippolyte qui l’épouvante, dit : « Hippolyte… ce tigre ! (Monsieur Faguet, je vous en prie, lisez Phèdre ! )

Cent tigres !… C’est bien encombrant, et je cherchais à me défaire de cette ménagerie, quand un délicieux article paru au Figaro, sous la signature de Mme Gérard d’Houville, m’a fait prendre patience. En voici quelques bribes : « Mais l’avions-nous attendu, le livre de M. Masson-Forestier sur Racine, pour trouver de la férocité à ce poète incomparable ?

« Anatole France et Leconte de Lisle lui en avaient toujours trouvé : Jules Lemaître se méfiait… Moi… j’ai compris qu’il était terrible… divinement !… Et tendre aussi. Rien ne va mieux