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Nous transcrivons cette période en cinq petits vers ; elle pourrait n’être que de trois, sans en valoir ni plus ni moins.

On a trouvé que ce duo ressemblait à celui de Tristan. Il le rappelle en effet par la situation ou le sujet, le sujet des duos d’amour étant assez généralement le même. Peut-être s’en rapproche-t-il aussi par le plan, par la suite et la disposition des épisodes et, sinon des rythmes, des mouvemens. Entre les autres éléments de musique pure, je ne saisis point le rapport : tout au plus quelque analogie, vers les dernières pages, dans l’entrée successive et l’enlacement des deux voix. Et puis le duo de Tristan s’achève au paroxysme ; celui-ci finit en douceur. Il finit deux fois, c’est vrai : quand on le croyait terminé, voici qu’il reprend, mais on ne songe pas à s’en plaindre, la dernière reprise n’ayant pas le moins de charme et de poésie. Si vous ajoutez à la sensibilité, voire à la passion, musicalement exprimée, le pittoresque et le paysage, un décor et comme une atmosphère, musicale elle-même avec discrétion, avec légèreté, vous comprendrez qu’après six semaines déjà passées on se souvienne encore du second acte de ce Miracle, au moins comme d’une agréable surprise. Voyez-vous, nous ne sommes pas gâtés, pour le moment. Alors que la musique, si souvent (rappelez-vous Macbeth) est une chose obscure, factice, pénible, odieuse, que pendant une demi-heure elle soit une chose claire, sincère, agréable, émouvante, enfin une belle chose, « Je ne suis pas de ceux qui disent : ce n’est rien… »

Pour être juste, il faut compter encore un bon quart d’heure, un quart d’heure excellent, celui du ballet. Une bourrée populaire y est le thème d’ingénieuses variations : l’une surtout est enlevée avec une franchise, un éclat, une verve de rythme irrésistible. Mme Aida Boni l’a dansée, ou plutôt, excusez le solécisme, elle l’a bondie et rebondie comme un jeune faon. Mlle Chenal (Alix la courtisane) est belle en effet « à miracle. » L’artiste n’a que le tort, — dont cette salle maudite est la première coupable, — de trop « pousser » et par là de réduire, d’amincir d’autant, une voix qui n’est pas sans beauté. M. Muratore chante bien. Depuis le départ de M. Jean de Reszké… Entendez-vous le latin ? — Point du tout. — Eh bien ! « longo sed proximus intervallo, » voilà M. Muratore.


« Don Quichotte, comédie héroïque, » si l’on en croit l’affiche, le programme et la partition. Mais alors, et la musique ? Il y en a tout de même un peu, un petit peu. Nous dirons, si vous voulez, que sur le sujet, le roman, l’épopée de Cervantes, autour, à côté, au-dessous,