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Tel était, dans ses grandes lignes, le projet de loi. Il assignait un rôle à trois facteurs : les élus du peuple, l’évêque, l’Etat. Les droits qu’avait jusque-là possédés la hiérarchie pour l’administration des biens d’Église devaient désormais être limités, d’un côté, par deux pouvoirs résultant du suffrage universel des catholiques, de l’autre côté, par la bureaucratie. Le projet faisait une part à l’évêque, mais ajoutait immédiatement qu’on se passerait de lui, s’il le fallait. Tous les citoyens inscrits comme catholiques et prenant leur part des charges paroissiales étaient appelés à former, en face du sacerdoce, une formidable puissance démocratique : pratiquant ou non leur culte, déférens ou non pour leurs curés, voire excommuniés, ils demeureraient électeurs, éligibles ; et, servant Dieu bien ou mal, ils régneraient en quelque mesure sur toute la vie matérielle de l’Eglise de Dieu. La collectivité des membres de l’Église acquérait sur les biens de l’Eglise toute une série de droits jusque-là réservés à la hiérarchie.

C’est une usurpation, c’est une confiscation, c’est l’application du principe : La propriété c’est le vol, avaient expliqué au Landtag, dans les séances des 16 et 17 février, les députés Pierre Reichensperger, Dauzenberg et Windthorst ; et Falk, invité à préciser les irrégularités d’administration par lesquelles les évêques avaient mérité ces mesures de défiance, avait manqué d’élémens pour un réquisitoire décisif. On avait été gêné par la subtilité juridique de Pierre Reichensperger, demandant pourquoi les nouvelles réglementations élaborées en 1874 pour les communautés protestantes n’avaient pas été soumises aux Chambres, et pourquoi tout au contraire on remettait au caprice du législateur le soin de régler le fonctionnement matériel des paroisses catholiques ; mais on avait remarqué, cependant, que le Centre apportait moins d’acharnement contre ce projet que contre les lois antérieures ; et, dans les Grenzboten, Roesler avait exprimé l’inquiétude que les catholiques n’attendissent de cette loi certaines conséquences favorables et que la représentation paroissiale ne fût composée, partout, de partisans fanatiques de la hiérarchie.

Au nom des principes, Melchers, archevêque de Cologne, avait tout de suite protesté contre le projet : dans une lettre au Landtag, il avait démontré qu’une telle loi impliquerait une sorte de sécularisation des biens d’Eglise, désormais transférés