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LA FILLE DU CIEL.

Porte-Flèche. — Hélas ! même pendant les heures de joie l’inquiétude nous mord; hélas! quand larome délicieux d’une fleur nous caresse, il nous faut redouter l’orage qui toujours gronde à l’horizon!... La gazelle avait un peu de répit parce que le tigre était blessé. S’il guérit, il se rejettera aussitôt à la poursuite de sa proie. Lotus-d’Or. — Quel est le sens de cette image? Porte-Flèche. — C’est que l’empereur tartare, celui qui règne à Pékin et nous considère, nous Chinois dépossédés, comme des rebelles, vient d’être vaincu dans une guerre que lui ont faite les barbares formidables de l’Occident; à grand’peine il a obtenu la paix et n’est pas tout à fait remis de sa défaite. Lotus-d’Or. — Ah! oui, le bruit de cette guerre nous était venu; mais quelle en fut donc la cause? Tranquille-Elégance. — Comme la politique l’intéresse... La Perle. — Quand c’est ce jeune homme qui l’enseigne... Porte-Flèche. — La cause en est singulière : un prince, parent de l’usurpateur tartare, a eu la folle idée de réunir une troupe de bandits, sous prétexte de la jeter contre les sujets chrétiens en exécration dans le nord de la Chine. Mais, lahorde déchaînée, on n’a pu la retenir; elle s’est ruée aussi contre les barbares étrangers, dont la présence était depuis longtemps tolérée autour des palais. Alors les armées des nations d’Occident sont^venues saccager Pékin, d’où l’empereur tartare, avec toute sa cour, s’était enfui. Lotus-d’Or. — Sans doute, il est malheureux pour nous que l’usurpateur ait obtenu la paix... Porte-Flèche. — Qui sait? La Chine serait tombée peut- être sous une domination plus funeste encore... Tranquille-Elégance. — La leçon n’est pas finie?... Lotus-d’Or, se relirant. — 11 est temps, seigneur, de nous parer pour la fête. Porte-Flèche. — C’est vous qui embellirez la parure. Lotus d’Or. — Ne vous moquez pas... Au revoir, sei- gneur. Porte-Flèche, q^ii voit venir quelqu’un vers la droite. — Oh! rentrez vite!... Votre illustre voisin, le vice-roi du Sud, se promène dans les jardins et vient de ce côté-ci. Tranquille-Elégance, baissant un store de bambou. — Si nous pouvions l’apercevoir à travers les stores!...