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Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 2.djvu/455

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REVUES ÉTRANGÈRES

LA JEUNESSE DE SPINOZA



Der junge Spinoza, Leben und Werdegang im Lichte der Weltphilosophie, par Stanislas von Dunin Borkowski, 1 vol. in-8, illustré, Munster-en-Westphalie, librairie Aschendorff, 1911.


Un certain samedi d’avril de l’année 1640, toute la communauté des juifs portugais d’Amsterdam se trouva réunie dans sa synagogue pour assister et prendre part à une cérémonie d’un intérêt exceptionnel : c’était ce jour-là que le fameux Uriel da Costa devait faire publiquement l’aveu de ses erreurs et obtenir à nouveau son admission dans la communauté, après avoir subi la pénitence prescrite par la Loi. Né et élevé dans la religion catholique, da Costa exerçait les fonctions de trésorier de la cathédrale d’Oporto lorsqu’en 1618, vers l’âge de vingt-cinq ans, un regret lui était venu des anciennes croyances naguère abjurées par ses parens. Il avait alors quitté le Portugal, en compagnie de sa mère, s’était fixé à Amsterdam, et y avait solennellement renié le christianisme. Mais bientôt la, publication d’écrits où il allait jusqu’à mettre en doute l’autorité révélée de la loi de Moïse avait commencé à scandaliser ses coreligionnaires ; et, à plusieurs reprises déjà, des tentatives de réconciliation avaient eu lieu entre lui et la synagogue : mais on l’avait vu, le lendemain, s’enfoncer plus profondément encore dans son hérésie. Cette fois enfin, accablé par la souffrance et par la misère, force lui avait été de s’avouer vaincu.

Debout sur une estrade, au milieu du temple, il lut d’abord à très haute voix la rétractation de toutes ses doctrines, en reconnaissant