Aller au contenu

Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 2.djvu/530

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
524
REVUE DES DEUX MONDES.

l’admets ; mais il ne fallait pas absorber l’Ecole normale, parce que, quand on la contient, il faut remplir tout son office.

Ce qui fait que ces jeunes gens ont une certaine animosité contre vous, c’est qu’ils viennent vous demander de les préparer aux examens et que vous les y préparez peu ou de mauvaise grâce.

Enfin parlons net, a dû se dire plus d’un professeur de la Faculté de Paris après avoir lu le livre d’Agathon, ce que demandent ces jeunes gens, d’un bout de leur livre à l’autre, c’est que nous, professeurs d’enseignement supérieur, nous leur fassions de l’enseignement secondaire.

— N’en doutez pas, c’est cela ; et pourquoi ? Parce que c’est l’essence même de leurs examens.

— Alors des rhétoriques supérieures et des « philosophies » supérieures pendant trois ans ?

— Certainement ; de plus en plus supérieures, de plus en plus élevées, d’accès de plus en plus difficile, mais restant toujours dans l’esprit de l’enseignement secondaire, étant toujours une culture générale de l’esprit. Je ne dis pas que ce soit là ce que je vous demande ; je dis que c’est ce qu’ils sont parfaitement obligés de vous demander. Ils y mettent peut-être aussi une préoccupation de dilettantes, ils y mettent peut-être aussi ce sentiment qui fait qu’on n’aime point à être dérangé et qu’on aime à continuer de faire ce que l’on faisait, il est possible, et même j’en suis sûr ; mais ils y mettent surtout des préoccupations de candidats.

Il y aurait bien un moyen de tourner la difficulté, ou plutôt de l’enlever d’un souffle, comme une paille. Ce serait de donner aux examens de licence et d’agrégation précisément ce caractère d’enseignement supérieur qui leur manque. Le désaccord cesserait du coup ; les professeurs ne feraient que de l’enseignement supérieur, mais en en faisant ils prépareraient aux examens : plus de difficulté, personne n’a plus à se plaindre. Oui ; mais du même coup aussi, c’est tout l’enseignement secondaire qui est dénaturé. Ce sont des hommes qui n’auront appris que l’art de faire la science que vous enverrez distribuer aux enfans la science faite ; ce sont des hommes qui se seront spécialisés dans un canton de la connaissance que vous enverrez donner aux enfans la connaissance générale. Tout ce qui est nécessairement l’enseignement secondaire, tout ce qui est par la force des