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Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 4.djvu/177

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vite ! »). Cette appellation avait été donnée à l’évêque par les indigènes émerveillés de son activité et toujours ingénieux à trouver le surnom expressif qui convient à chacun.

Depuis lors, le Léon-XIII et le Diata-Diata, bientôt renforcés par le Pie-X, sont constamment employés non seulement par les missionnaires, mais aussi par nos colons, par nos explorateurs et même par nos fonctionnaires dont quelques-uns, tel M. de Lamothe, après avoir décliné les offres compromettantes d’un évêque, ont été trop heureux de pouvoir utiliser ses bateaux pour suppléer au service insuffisant des navires de l’État.

Revenu de l’Oubanghi, Mgr Augouard se préparait à partir pour la région de l’Alima quand il reçut un câblogramme du ministre des Colonies lui demandant de prêter le Léon-XlII afin de porter au capitaine Marchand les renforts dont cet officier avait besoin pour continuer sa route de l’Atlantique au Nil. Rien, en effet, n’avait été prévu par le gouvernement qui, après avoir formé un rêve grandiose, n’avait donné à Marchand aucune facilité pour le réaliser. Depuis de longs mois les troupes destinées à renforcer l’expédition se morfondaient à Brazzaville sans pouvoir obtenir de la colonie un moyen de transport. À cette nouvelle, l’évêque, bien qu’il eût à se plaindre des procédés de l’administration à son égard, n’hésita pas, du moment que les intérêts de la France étaient en jeu et il prit lui-même la conduite de son bateau pour amener en toute hâte jusqu’à Banghi les renforts impatiemment attendus.

Au mois de mai 1899, Mgr Augouard mettait encore son steamer au service du gouvernement pour conduire dans le Haut-Oubanghi M. Gentil, « un modeste autant que courageux explorateur, » et ses compagnons qui se dirigeaient vers le Chari et le Tchad. L’évêque s’arrêta à Saint-Paul des Rapides (Banghi) où, l’année précédente, le P. Savinien avait été massacré par les Bondjos. Les religieux devaient se tenir constamment en garde contre les attaques des indigènes. Ceux-ci s’embusquaient dans les grandes herbes pour lancer leurs sagaies sur la viande qui parle représentée par le personnel de la mission ; souvent aussi, cachés dans les gros arbres, ils jetaient sur les toitures de chaume des flèches garnies d’étoupe enflammée et, pour se mettre à l’abri de pareilles surprises, on avait été obligé de remplacer le chaume par des toitures métalliques. On n’est jamais en sûreté avec de tels voisins !