Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 4.djvu/247

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LE
COURONNEMENT DE GEORGE V


AVANT LA SEMAINE DU COURONNEMENT

J’ai vu, il y a dix-huit mois, l’Angleterre en plein accès de fièvre électorale[1]. Je vais la voir en plein accès de fièvre monarchique. Aussi, prévenu depuis quelque temps déjà, que je serais honoré d’une invitation à assister, dans l’abbaye même de Westminster, au couronnement du roi George V et de la reine Mary, j’ai, ces deux dernières semaines, parcouru avec une attention particulière dans les journaux anglais les articles relatifs à cette cérémonie, sur lesquels je n’avais jeté jusqu’à présent qu’un coup d’œil un peu distrait. Au fur et à mesure que la grande semaine approchait, la place consacrée dans les innombrables colonnes de ces journaux aux questions politiques et en particulier aux débats parlementaires allait diminuant, celle consacrée aux préparatifs du couronnement allait augmentant. C’est qu’une sorte de trêve, sinon de Dieu, au moins du Roi, a été conclue entre les partis. À demain les affaires sérieuses, à demain les querelles. Aujourd’hui, on veut être tout à la joie.

N’y a-t-il pas, dans cette place plus grande accordée par les journaux à ce qui concerne le couronnement qu’à ce qui concerne la politique, le symptôme d’un état d’esprit que je crois apercevoir depuis longtemps : à savoir une dissociation d’idées entre

  1. Voyez, dans la Revue du 1er février 1910, Dix Jours en Angleterre pendant les élections.