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Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 4.djvu/447

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pousser les enchères ; ils estiment insuffisante la proportion qui leur est assignée et ont obtenu, en 1910, qu’elle fût dans certaines conditions portée à la moitié : telle est leur passion pour la propriété foncière qu’ils useraient parfois de subterfuges, de personnes interposées, pour s’assurer indirectement les lots des métropolitains. Chaque année, malgré tout, quelques familles de ruraux français viennent se fixer en Algérie : cet effectif des immigrans français s’accroîtrait probablement si l’administration étendait le système de la concession de lots urbains avec jardins, qui seraient recherchés par des ouvriers. En beaucoup de villages neufs, on manque de serruriers, de bourreliers, de charrons ; sans renoncer aux ruraux, parmi lesquels il faut continuer la propagande, on pourrait s’adresser aussi à la population des villes. La colonisation ouvrière tentée en 1848, après les journées de Juin, a d’abord connu des mécomptes, mais quelques-uns des nouveaux venus et beaucoup de leurs fils sont devenus des colons excellens.

Le service militaire devrait être aussi un moyen de mêler les Algériens aux Français de la métropole. La loi de deux ans a fait perdre aux conscrits algériens le bénéfice de la dispense de douze mois qui leur était antérieurement acquise ; sans discuter ici sur l’opportunité de cette suppression, nous pensons qu’il y aurait profit, pour tous, à ce que le service des Algériens fût fait dans des régimens de France, et réciproquement que les corps d’Algérie fussent largement recrutés parmi des conscrits français ; ceux-ci pourraient être choisis de préférence dans les régions qui fournissent de bons candidats à l’émigration, Alpes, Pyrénées, Massif Central. Le travail, à la caserne, doit être surtout militaire et non post-scolaire, mais la vie seule dans une garnison d’Algérie, un mois de manœuvres dans le bled présentèrent au jeune soldat de France assez de spectacles nouveaux pour éveiller sa curiosité et peut-être le fixer dans la colonie. S’il était permis de risquer une opinion sur la transformation de notre régime militaire, nous dirions que l’Algérie est le cadre indiqué pour la formation et l’instruction de régimens français coloniaux, recrutés exclusivement par engagemens volontaires, réserve toujours prête pour des expéditions d’outre-mer, et pépinière de colons, par concessions foncières à l’expiration du service… Mais ceci touche à bien des questions qui ne sont pas seulement algériennes.