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de Saint-Gervais, mais, comme elle est postérieure d’une vingtaine d’années, il ne faut pas s’étonner d’y voir apparaître des traces de l’art baroque qui règne déjà à Rome et qui est sur le point de pénétrer en France. Cet art est caractérisé par ses recherches en vue de créer des façades plus ornées, plus variées de formes, surtout plus concentrées et d’un effet plus ascensionnel. C’est ainsi que l’on voit réapparaître ces ornemens que l’architecte de Saint-Gervais avait si impitoyablement proscrits. À Saint-Paul, la zone des chapiteaux est décorée de guirlandes, les niches sont plus ornées, le fronton de la porte est garni d’un riche motif de sculpture, tous les chapiteaux sont de style corinthien. Mais c’est surtout dans la disposition architecturale que la transformation est intéressante à étudier. Le principe de verticalisme s’affirme de plus en plus par la concentration de l’intérêt sur la partie centrale de la façade : au lieu de conserver pour les colonnes la disposition uniforme et un peu monotone de Saint-Gervais, l’architecte de Saint-Paul ne laisse qu’une colonne à chaque extrémité, et en revanche il renforce et met en valeur, en les composant de trois colonnes, les groupes du centre. De plus, ces trois colonnes ne sont pas sur le même plan ; il y en a deux qui se projettent en saillie pour soutenir le grand fronton, pendant que la troisième est en retrait. C’est encore là une des formes caractéristiques de l’art baroque, c’est un des moyens qu’il a employés pour mettre de la variété dans ses œuvres, pour introduire de la perspective dans les façades et leur donner de la force en multipliant les oppositions d’ombre et de lumière. Et précisément, parce que c’était là une forme toute nouvelle, que ni les Romains ni les Grecs n’avaient employée, c’est une des formes de cet art que les puristes de l’école néo-classique ont le plus vivement critiquée.

Mais, laissant de côté l’étude des différences qui séparent la façade de Saint-Paul de celle de Saint-Gervais, il faut surtout s’attacher à ce qui les unit, à la tradition gothique, qui veut exprimer l’idée de hauteur dans les nefs des églises et surtout dans leurs façades. Quelle que soit la beauté de ces deux façades, elles n’ont pas été imitées : elles n’étaient ni assez italiennes, ni assez françaises. La façade française trouve dans le clocher son expression la plus complète et c’est à la reprise de cette forme que les architectes français vont être logiquement