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même ils en discutèrent. Ils voulaient l’offensive avec la même ardeur qu’ils voulaient la guerre. Leur confiance était extrême. Ils croyaient au talent de leurs vieux chefs, élèves du grand roi ; ils avaient foi dans la tactique frédéricienne ; ils espéraient tout de la discipline au feu, de la vaillance de leur infanterie et de l’élan de leurs irrésistibles escadrons. « Bonaparte, disaient les généraux, n’est pas digne d’être caporal dans notre armée. »

« Et que deviendront, disait-on encore dans les états-majors, devant nos généraux qui ont appris la guerre dès leur jeunesse, ces tailleurs et ces savetiers improvisés généraux par leur Révolution. » Quant aux soldats français, « ce sont toujours les soldats de Rosbach ; il suffit de foncer dessus pour les mettre en fuite. » « En trois mois, dit le major Kamps, et avec des forces égales aux deux tiers des leurs, nous chasserions à coups de fouet ces gaillards-là au-delà du Rhin ! »


II. — PREMIÈRES HOSTILITÉS

Pendant tout cet été de 1806, Napoléon croyait fermement au maintien de la paix. Le 17 août, il écrivait à son major général le prince Berthier : « Il faut songer sérieusement au retour de la Grande Armée, puisqu’il me paraît que tous les doutes d’Allemagne sont levés… Vous pouvez annoncer que l’armée va se mettre en marche. Mais dans le fait je ne veux rendre Braunau que quand je saurai si le traité avec la Russie a été ratifié. Il a dû l’être le 15 août. Ainsi, dans dix jours, j’en saurai la nouvelle. Cependant, il faut cesser tout préparatif de guerre et ne faire passer le Rhin à aucun autre détachement et que tout le monde se tienne prêt à repasser en France. » L’Empereur n’ignorait pourtant pas les arméniens de la Prusse, mais il les jugeait si vains, si ridicules qu’il ne s’en inquiétait pas. Le 26 août, il écrivait à Berthier : « Le Cabinet de Berlin s’est pris d’une peur panique. Il s’est imaginé que dans le traité avec la Russie, il y avait des clauses qui lui enlevaient plusieurs provinces. C’est à cela qu’il faut attribuer les ridicules arméniens qu’il fait et auxquels il ne faut donner aucune attention, mon intention étant effectivement de faire rentrer mes troupes en France. J’espère enfin que le moment n’est pas éloigné où vous allez revenir à Paris. » Le 4 septembre, il accorde un