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Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 4.djvu/653

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France : Bonaparte ne manquerait pas d’ajouter foi à ses paroles, attendu la considération toute particulière qu’il avait pour lui.

Cette accusation de corruption portée contre Lannes ne mérite que le dédain. On n’a pas oublié, d’ailleurs, que le général avait tenu à mettre son gouvernement au courant de la tentative faite auprès de lui par le nonce ainsi que de la manière dont il avait cru devoir s’y prêter, pour obliger ses adversaires à montrer leur jeu. Le nonce est, évidemment, le ministre étranger dont parle Souza. On comprend que Bonaparte n’ait attaché aucune importance à des calomnies aussi ridicules qu’odieuses.

En attendant, le Portugal arme ses vaisseaux, mais lentement ; on décrète une nouvelle levée de 8 000 hommes, car le bruit s’est répandu qu’en cas de rupture avec l’Angleterre, la France enverrait un corps de troupes en Portugal. Aussi l’Angleterre, prévenue, a-t-elle déclaré à la Cour de Madrid qu’elle regarderait toute entrée de troupes françaises sur le territoire espagnol comme une déclaration de guerre.

En présence de cette situation qui s’aggrave, Lannes croit le moment venu de décider le Régent à embrasser le parti de la France. Il lui remet une note par laquelle il réclame dans les termes les plus cassans la destitution de Pina Manique de ses fonctions d’intendant général de la Police, — l’expulsion de Coigny et de tous les émigrés faisant partie de l’état-major de Vioménil, — le rappel de La Foens et de Séabra, exilés en province à cause de leurs opinions libérales et francophiles, — enfin le renvoi d’Almeida et de Rodrigo de Souza. Non content d’exiger tant de choses, il demande une réponse dans les trois jours ; comme trois jours se passent, sans réponse, il se rend en personne à Queluz, on refuse de l’admettre auprès du Prince ! C’en est trop pour le bouillant général ; il réclame, non plus seulement l’exécution, dans les vingt-quatre heures, de ses demandes, mais encore réparation pour ce nouvel outrage, ou ses passeports.

Ce n’est pas vingt-quatre heures qui se passent, c’est quatre jours, et toujours pas de réponse. Il faut cependant sortir de cette situation. Le 28 floréal, Lannes envoie Fitte à Queluz « avec l’instruction formelle de réclamer les ordres de Son Altesse, Royale et de ne pas quitter sans avoir sa réponse définitive. »

Démarche inutile : Fitte revient de Queluz les mains vides, et c’est seulement le 1er prairial que Almeida se décide à