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porté le coup de grâce : reste à savoir par quoi et comment il sera remplacé. La Chambre a témoigné de l’intérêt qu’elle portait à la réforme, ou peut-être seulement que ses électeurs y portaient, en refusant de l’ajourner jusqu’après les vacances. M. Caillaux lui demandait de le faire pour donner au gouvernement le temps de préparer des textes qu’il lui soumettrait à la rentrée ; mais la Chambre s’est obstinée à continuer le débat, et c’est le seul échec que M. Caillaux ait éprouvé. Il n’est pas bien grave. Pourquoi la Chambre aurait-elle interrompu la discussion de la réforme ? Ne savait-elle pas que le décret de clôture de la session allait lui épargner de prendre cette responsabilité. Le décret est intervenu, en effet, aussitôt que le budget, après avoir fait plusieurs fois la navette entre les deux Chambres, a été définitivement voté. Et on s’est séparé à bout de forces, sans avoir d’ailleurs rien fait. La stérilité parlementaire donne beau jeu au gouvernement s’il veut, vraiment gouverner, c’est-à-dire agir.

Nous ne dirons peu de chose aujourd’hui des négociations qui se poursuivent à Berlin entre M. de Kiderlen-Waechter et M. Jules Cambon. M. le ministre des Affaires étrangères, interpellé à ce sujet par M. Jaurès, a demandé à la Chambre de remettre l’interpellation à plus tard et s’il jugeait qu’une discussion prématurée pouvait avoir des inconvéniens à la Chambre, elle pourrait en avoir aussi dans la presse. M. de Selves s’est contenté d’assurer, et cela a paru pour le moment suffisant, que la négociation engagée serait continuée avec le souci que commandent les intérêts et la dignité de la France, et aussi avec celui de maintenir avec la nation, avec laquelle nous causons, des rapports de bonne entente et de haute loyauté. Ces paroles, qui ont été accueillies favorablement chez nous, et qui devaient l’être, ont produit aussi une bonne impression en Allemagne. Il semble donc que la conversation se soit ouverte dans une atmosphère apaisée.

Mais cette atmosphère est encombrée de nuages, et ce ne sont certainement pas les articles de journaux allemands qui les dissiperont. L’un dit blanc, l’autre dit noir, ils se contredisent les uns les autres, soit qu’ils veuillent par là égarer ou énerver l’opinion, soit que le gouvernement impérial n’ait pas encore arrêté ses vues définitives. Cette seconde impression est la plus vraisemblable. Personne en effet n’a regardé comme sérieuses les premières demandes que M. de Kiderlen a, paraît-il, adressées à M. Cambon, et qui portaient sur la moitié du Congo français confinant à l’Océan, que nous aurions