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des soins longtemps continués ; mais ici, dans les conditions de race, de climat, de travail, de fatigue, d’hygiène, où nous observons et suivons ces phénomènes, en général le relèvement n’a pas lieu et la déchéance est définitive. À ce premier fait déjà intéressant s’en ajoute un second plus suggestif, c’est que les mariages mauvais, rares autrefois, sont devenus plus fréquens et que leur fréquence augmente à mesure que la natalité diminue.

Comment en serait-il autrement ? Il n’y a guère plus qu’un enfant par famille : on ne néglige rien pour le conserver. Si la race est déjà touchée, il sera plus faible, plus délicat : on redoublera de précautions. et de soins. Rien n’égale la sollicitude des jeunes paysannes pour leurs nourrissons, les plus pauvres ne reculent devant aucun sacrifice ; il semble qu’issues d’une longue lignée de femmes fécondes, elles veuillent dépenser sur l’unique enfant, auquel elles sont réduites, les trésors de tendresse maternelle que l’atavisme a accumulés dans leurs cœurs. Elles parviennent à sauver les plus malingres et à les conduire à l’âge d’homme.

Aussi, dans les générations nouvelles qui arrivent à la nubilité, la proportion des malades, des prédisposés, des malvenus, des insuffisans de santé, des dystrophiques, comme les médecins les appellent, est considérable. Un choix serait nécessaire, et il est impossible avec des contingens misérables par le nombre. Chaque famille veut se continuer avec son unique rejeton : tout est requis, tout est pris à cet effet, et les mariages défectueux ou franchement mauvais se multiplient chaque année. Ils affaiblissent, altèrent et ruinent la race.

Certains attendaient autre chose de l’hyponatalité ou plutôt essayaient sans doute de s’en consoler en pensant que le bien sortirait du mal. Une descendance restreinte, entourée de soins plus attentifs et plus rationnels, soumise à une hygiène physique et morale meilleure, devait acquérir une valeur sociale supérieure. Un bon soldat et un bon ouvrier valent plus que trois mauvais ou médiocres : on devine la série des raisonnemens aboutissant à cette conclusion que par une population, clairsemée mais d’élite, la France garderait son rang dans le monde. C’est une illusion qui ne résiste pas à la lumière des faits tels que les montre l’étude démographique de nos villages gascons. Depuis que beaucoup de bancs restent vides à la petite