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Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 4.djvu/828

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par l’existence du « professeur principal, » et la formation de l’esprit des élèves était confiée au « professeur principal, » au professeur qui avait sous sa main directrice les élèves une fois au moins par jour et six classes au moins sur dix. Celui-là avait sur les enfans une action continue, constante, pareille à elle-même et qui ne se démentait pas. C’était lui qui constituait la coordination.

Le professeur principal n’existe plus. M. le Ministre le regrette, M. Ribot déplore sa disparition. M. le Ministre : « Aujourd’hui, ce que vous regrettez et ce que je regrette avec vous, c’est la disparition de ce qu’on appelle le professeur principal, de cet homme de culture particulièrement délicate, d’esprit clair, de sentiment pur, dont le contact prolongé était pour nos esprits et pour nos cœurs une leçon de tous les instans… » — M. Ribot : « Chaque professeur, suivant l’ordre auquel il appartient, se considère comme ayant un domaine qui n’a pas de frontière commune avec les domaines voisins. »

Et donc, pour faire cesser ces compétitions et ces empiétemens et cette couverture tirée à soi par chacun, il faudrait un professeur principal, un professeur qui fût, comme disait Jules Simon, « l’éducateur. » Évidemment, mais quel professeur, désormais, sera le professeur principal ? M. le Ministre regrette le professeur principal, mais confesse « ne pas croire qu’il soit très facile d’arriver à l’établir. » Pourquoi ? Parce que chaque professeur, qui de latin et français, qui d’histoire, qui de sciences, voudrait l’être et considérerait comme monstrueux qu’un autre le fût. M. le Ministre lui-même serait embarrassé au choix. S’il s’agissait de donner ce principat au professeur de latin et français, il dirait sans aucun doute : « Je tiens le professeur de latin et français pour un éducateur de tout premier ordre ; seulement, je crains qu’il ne soit un cuistre. » Il pencherait un peu, je crois, tel que je le connais, pour le professeur d’histoire ; mais encore il aurait sans doute quelque hésitation. Le professeur principal et c’est-à-dire le professeur formateur d’esprits, dans l’enseignement tel qu’il est compris au XXe siècle, c’est-à-dire dans l’enseignement encyclopédique, est très difficile à trouver.

Que faire donc ? Se rencontrant encore ici, comme il leur est arrivé souvent dans cette discussion, M. Ribot et M. le Ministre ont eu la même idée. M. le Ministre : « On peut suppléer à cette disparition du professeur principal… d’abord en coordonnant