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LA CRISE DE L’ÉTAT MODERNE

LA HIÉRARCHIE DES PROFESSIONS DANS L’ANCIENNE SOCIÉTÉ FRANÇAISE[1]. — LA RÉHABILITATION DES ARTS MÉCANIQUES.

Ce n’est point sans patience ni longueur de temps, ce n’est pas non plus sans efforts ni convulsions que l’État moderne est né de l’État ancien, et que de l’ancienne société est sortie la société moderne. Le passage, en effet, ne pouvait qu’être ardu de l’un à l’autre régime politique et social. Si, sur tel ou tel point, par tel ou tel détail, l’ancienne société ressemblait plus à la nouvelle qu’on ne l’aurait cru tout d’abord, et notamment si quelques-unes de nos difficultés, ou même quelques-unes de nos angoisses ne lui furent pas épargnées, néanmoins, en son fond et dans son ensemble, c’était une société très différente de la nôtre. Très différente par sa structure interne, par les multiples divisions et distinctions, sous-divisions et sous-distinctions, qui la coupent et la recoupent, qui en font une société à cloisons, à étages, à compartimens.

On a bien dit (et ne l’ai-je pas répété ? ) qu’ « en général, d’homme à homme, sinon de position à position sociale, la barrière était moins haute dans l’ancien que dans le nouveau

  1. Sous le même titre j’ai présenté, l’an dernier, à la séance des Cinq Académies, une très rapide esquisse de ce travail. Mais le sujet m’a paru d’une importance telle, lorsqu’on essaie de « découvrir, » comme dit Taine, la constitution sociale de la France, que j’ai cru indispensable de le reprendre pour une étude approfondie. C’est cette étude dont la Revue veut bien accueillir aujourd’hui la première partie : elle va jusqu’à 1750. Une seconde partie nous conduira jusqu’à la période contemporaine. De la notice lue à l’Institut, à peine ai-je conservé quelques courts fragmens.