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contingences de l’heure et il le convie à le suivre sur les hauteurs où règnent les harmonies économiques.

A toutes les époques de sa vie, Levasseur a été occupé de questions géographiques. Nul mieux que lui n’a connu notre globe. Après avoir étudié la configuration de chaque pays, il portait son attention sur les habitans ; il voyait les races s’implanter, se succéder, se transformer au cours des siècles ; il observait l’action de l’homme sur la nature, qui lui fournit ce dont il a besoin, à condition qu’il travaille, qu’il arrache des entrailles de la terre les métaux et le combustible, qu’il laboure et sème pour récolter, qu’il construise les Usines, qu’il capte les eaux. Levasseur a été un grand géographe, parce qu’il n’était pas que cela, parce qu’il mettait au service de ses études géographiques sa science d’historien, d’économiste, et, avant tout, ses méthodes de statistique, qui éclairent d’un jour si complet ses travaux descriptifs.


III. — L’HISTORIEN

En 1861, à l’âge de 33 ans, Levasseur était nommé professeur d’histoire au lycée Napoléon, qui a repris aujourd’hui le nom de Henri IV ; la même année, il était appelé à siéger au Comité des travaux historiques ; il devint en 1904 vice-président, puis président de la Commission centrale du Comité des Travaux historiques et scientifiques. Depuis le commencement jusqu’à la fin de sa carrière, il a consacré une partie de son labeur à l’histoire, mais plus spécialement à l’histoire financière et économique. C’est cette direction que prenaient ses études dès le début de sa vie universitaire : sa thèse de doctorat es lettres, soutenue en 1854, avait pour sujet Recherches historiques sur le système de Law. Elle est demeurée classique ; Levasseur y étudiait une époque restée fameuse, mais qui n’avait pas encore été racontée avec la précision, avec l’abondance de faits et de documens qui rendent si précieux les livres sortis de cette plume loyale. Il nous fait parcourir, jour par jour, les étapes successives du « Système » qui parut d’abord apporter à la France une prospérité merveilleuse, qui eût rendu de grands services, si Law était resté fidèle à son programme, mais qui ne tarda pas à dégénérer en catastrophe. L’orgie de papier provoqua les pires excès du despotisme économique, le plus fragile d’ailleurs