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que l’Hôtel-Dieu de Paris recevrait la jonchée de son palais, qui était renouvelée tous les matins. Les jours de fête, ou à l’occasion de cérémonies particulières, des étoffes de couleur, taffetas ou cendal, des tapis et des pailes sont tendus aux murs : ce qu’on nommait les « dossiers. » Enfermées dans des coffres, ces étoffes suivaient le Roi quand il changeait de résidence.

Les chambres de la Reine et des pucelles étaient revêtues de lambris de bois.

On vit à la Cour de France avec la plus grande simplicité. Walter Map, chanoine de Londres, vient à Paris sous le règne de Louis VII. Il rapporte que, s’entretenant certain jour avec le Roi, celui-ci lui traça un parallèle entre la Cour d’Angleterre et la Cour de France. « A ton souverain, lui dit Louis VII, il ne manque rien : hommes, chevaux, or et étoffes de soie, pierres précieuses et fruit et gibier, il a tout en abondance ; à la Cour de France, nous n’avons que du pain, du vin et de la gaîté. — J’ai noté ces paroles, ajoute l’Anglais, parce qu’elles étaient vraies et courtoises ; » car il y voyait naturellement un très grand éloge et la supériorité de son suzerain. On possède les comptes de la Cour de France pour les années 1202-1203, deux années du règne de Philippe-Auguste. Elles répondent à des mœurs très simples. Le Roi et les princes de sa famille ne changent de vêtemens que trois fois par an, à la Saint-André, à la Noël et à l’Assomption. A la table de Philippe le Rel, on ne servait que trois plats ; les jours maigres quatre plats étaient autorisés. Pour dessert, les fruits récoltés dans le verger royal, réservés d’ailleurs à la table du monarque et de ses frères, car les seigneurs et les officiers de la couronne ne recevaient pour leur part que des noix sèches. En carême, tous avaient également pour dessert des noix, des figues et du raisin sec.

Le Roi mange avec ses officiers, avec les prélats et avec les barons palatins qui le secondent dans l’expédition des affaires. Repas royal auquel chacun peut assister en spectateur, en curieux : la maison du Roi est ouverte à tous. Aussi la foule s’y pressait-elle. Au dessert, le restant des mets était réparti entre les personnes présentes, usage qui se conservera jusqu’à l’extrême fin de la monarchie.

Le roi des ribauds avait charge de maintenir un peu d’ordre dans une assemblée aussi nombreuse, à quoi il avait grand’peine. Parfois s’élèvent « noise, courroux et mêlée ; » les