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supérieur et l’inférieur d’un autre. Elle impose aux deux parties des devoirs respectifs, mais elle présume chez l’une plus de véracité, accorde à sa parole plus de confiance, lui reconnaît, pourvu qu’elle en use modérément, le droit de correction, distingue par le livret les méritans et les indignes. Ce n’est donc pas la faute du législateur si les rapports des deux parties ne sont pas toujours ce qu’ils devraient être. Un commentateur de l’édit du 25 février 1565, Philibert Buygnon, impute aux guerres civiles le mécontentement général de son sort, les aspirations communistes, la convoitise du bien d’autrui, la corruption des mœurs d’où vient le mauvais esprit qu’il constate chez les domestiques. Et cependant il écrit en 1572, dix ans seulement après que ces guerres ont commencé. Qu’aurait-il dit en 1598, au moment où elles finissaient ? Buygnon a raison. Toutefois, les guerres civiles ne peuvent expliquer les crises qui se produisirent au milieu du siècle suivant. Nous en avons signalé une dans le Velay en 1640, qui eut pour cause l’absorption du travail féminin par l’industrie dentellière. En Provence, vers la même époque, on souffrit de la même pénurie compliquée de la difficulté de faire de bons choix, et ici, nous ne savons ce qui provoqua cette diminution dans la quantité et la qualité. La misère, en effet, était très grande et les places auraient dû être recherchées. On avait, au contraire, beaucoup de peine à se faire servir. Les gens du pays, qui consentaient à se placer, étaient si peu fidèles, si peu soucieux des intérêts de leurs patrons, qu’il fallait les surveiller de très près. Les patrons étaient si peu sûrs de les garder, si peu confians dans leur probité, que la sollicitude qui leur était habituelle se refroidissait, et, quand ces mercenaires de passage tombaient malades, au lieu de les soigner chez eux, ils les envoyaient se guérir ailleurs. Le luxe de la toilette avait gagné les servantes et ce qu’elles ne dépensaient pas en parure, elles allaient le perdre à la blanque c’est-à-dire à la loterie publique. Leur coquetterie ne s’interdisait rien de ce que portaient leurs maîtresses. Elles auraient dû s’en tenir comme coiffure au bavolet, au couvre-chef, à la calle, comme jupe à la hongreline, à la cotte garnie d’une chaîne d’argent ou de laiton où pendaient les ciseaux et du demi-ceint d’argent. Au lieu de cela, elles se permettaient le chaperon, puis l’escoffion, et jusqu’au masque. A Bordeaux, en 1627, elles se coiffaient à la garcette, tout