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par les saisons sur l’abondance des récoltes. Non ; les événemens actuels et le problème qu’ils posent comportent et entraînent une modification qui peut troubler profondément le pays tout entier, pendant une période de transition et de transformation. Durant cette période de crise, l’agriculture et la propriété foncière bénéficieront des avantages qui correspondent exactement aux sacrifices supportés par l’acheteur des denrées agricoles.

Il y a trente ans, la baisse des produits de la terre a provoqué une autre crise et troublé profondément la répartition des richesses produites. Elle a réduit les recettes et les profits de l’agriculteur, diminué le revenu aussi bien que la valeur vénale du sol, c’est-à-dire d’un capital de 90 milliards qui représentait le tiers de la richesse privée des Français.

La hausse actuelle agit en sens inverse, mais d’une façon semblable. Elle doit, selon nous, enrichir ceux que la baisse avait appauvris, c’est-à-dire les producteurs et les propriétaires fonciers ; elle doit appauvrir ceux que la baisse avait enrichis en réduisant leurs dépenses, c’est-à-dire les consommateurs eux-mêmes.

Ainsi posé, le problème que nous nous proposons d’étudier n’intéresse pas seulement les ménagères et les marchands de légumes. Il a toute la portée d’une question sociale dont nous n’avons pas besoin de démontrer l’exceptionnelle gravité.

Avant d’être autorisé à conclure, il nous faut toutefois noter les faits avec précision et déterminer leurs caractères.


LA HAUSSE ET SES CARACTÈRES

Le public connaît mal le phénomène économique dont nous nous proposons l’étude en ce moment. À ses yeux, la hausse des produits agricoles est un fait tout récent, datant de quelques mois, d’un an au plus, et le cours des denrées alimentaires serait seul affecté par cette brusque montée des prix.

C’est là une double erreur. On a pu observer depuis près de dix ans le mouvement ascensionnel de la cote des denrées agricoles, et les matières premières industrielles subissent la même influence que les produits alimentaires.

En France, par exemple, le cours du blé s’élève graduellement