Page:Revue des Deux Mondes - 1911 - tome 5.djvu/823

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

deux années 1872 et 1873 (nombre-indice 111 en 1873), pendant lesquelles il s’est produit une augmentation semblable à celle de la période précédente. »

En définitive, la hausse signalée en France après 1850 n’a donc pas eu les caractères d’une crise, d’un accident, d’une fluctuation brusque, mais passagère. Pendant vingt-trois ans notamment, le cours des grands produits agricoles, tels que les céréales et le bétail, est resté très élevé. Ce phénomène est d’autant plus remarquable que les droits protecteurs établis par la Restauration et le gouvernement de Juillet depuis 1819 jusqu’à 1848 ont été précisément suspendus ou supprimés entre 1850 et 1855. Le régime libéral ainsi inauguré au moment où la hausse se dessinait et s’accentuait chaque année n’a pas enrayé ce mouvement des prix ; il en a simplement limité l’ampleur au grand profit des consommateurs. Il n’a pas nui d’ailleurs aux intérêts de l’agriculteur. Celui-ci n’a jamais vendu ses denrées plus cher qu’après l’abolition des tarifs protectionnistes votés trente ou trente-cinq ans auparavant, c’est-à-dire au début d’une période de baisse comparable à celle qui vient de se terminer vers 1900.

En remontant plus haut dans le passé, et en suivant les fluctuations de prix des principales denrées agricoles, on constate immédiatement qu’à partir de 1815 jusque vers 1840 ou 1845, les cours fléchissent ou restent stationnaires, en dépit des efforts faits à maintes reprises par le législateur pour lutter contre la baisse et protéger la production rurale contre la concurrence étrangère.

Enfin, si nous remontons plus haut encore, nous nous trouvons en présence d’un phénomène économique analogue à celui qui nous préoccupe si vivement à cette heure, et semblable à cette brusque montée des cours signalée après 1850.

La hausse des produits agricoles caractérise au XVIIIe siècle la période qui s’étend de 1760 ou 1770 jusqu’à 1789 et même à 1800[1].

En France, le cours du froment se relève rapidement à partir de 1780. Nous avons noté ces variations en consultant les mercuriales de la « grenette » de Bourg-en-Bresse.

  1. Voyez nos Études sur les variations du revenu et du prix des terres en France, dans les Annales agronomiques, 1888-89, et dans les Annales de l’École des Sciences politiques, année 1894.