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Sans prendre parti pour l’Empire, nous nous sommes réjoui des victoires de l’Empereur et nous avons souffert de ses défaites. En 1814, Napoléon n’est plus le souverain. Il est le général, il est le premier des soldats français. Nous nous sommes rallié à son drapeau en disant comme le vieux paysan de Godefroy Cavaignac : « Il ne s’agit plus de Bonaparte. Le sol est envahi. Allons nous battre ! »

L’ouvrage parut au printemps de 1888. Le succès en fut prodigieux. Le volume, bourré cependant de notes, de références, de renvois aux cotes d’archives, le volume où des chapitres entiers consacrés à la stratégie napoléonienne nécessitaient l’emploi des cartes et exigeaient la vue de l’échiquier, le volume, d’apparence compacte et de style sévère, fut enlevé comme un roman. Jamais ouvrage d’histoire ne connut pareille fortune : au bout de quelques mois, les éditions se succédaient ; le nombre de ces éditions atteint aujourd’hui soixante-six, mais vingt furent tirées en bien peu d’années. Et ce devait être la fortune des volumes suivans qui tous dépassent actuellement soixante éditions, Waterloo atteignant le chiffre insolite soixante-dix mille. De la table des salons mondains à celle des élèves de l’Ecole de Guerre, la date fatidique 1814 s’aperçut. Houssaye resta, le premier, saisi de son succès.

Ce succès obligeait : le public réclamait « la suite. » On ne voulait pas rester sur le départ pour l’île d’Elbe. Il était revenu ; on voulait le voir revenir, triompher derechef, se battre derechef, et savoir la fin du drame.

L’historien avait déclanché un mouvement. Frédéric Masson a dit, parlant avec une éloquence passionnée devant la tombe ouverte où allait reposer Henry Houssaye, quel fut ce mouvement prodigieux d’études napoléoniennes et que Houssaye en fut « l’initiateur. » C’est le témoignage que celui-ci eût le plus prisé et, de fait, ce généreux hommage revêt une autorité singulière. L’ « initiateur » se devait de garder sa place dans cet immense « atelier » où, s’inspirant de lui ou simplement travaillant à côté de lui, un monde d’écrivains et de savans se mettaient au grand ouvrage. Houssaye écrivit 1815 : trois volumes qui ont pour sous-titres : Les Cent Jours, — Waterloo, — La Terreur Blanche.

Lorsque l’œuvre, née presque d’un hasard, mais où une nation avait en quelque sorte enfermé l’écrivain, fut achevée, il