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tion du cardinal de Valence occupe les esprits dans toute la ville de Rome. César abandonne de plus en plus le costume ecclésiastique et se montre partout à la française et en armes. Un jour même, accompagnant le fameux Djem ou Zizim à la visite des saintes basiliques, il parait en costume oriental ! »

On négocie déjà pour lui une alliance avec Charlotte, la fille du roi de Naples et d’une princesse de Savoie, élevée, comme tant d’autres princesses de haut rang de cette époque, à la cour vénérée de la reine Anne de France. Charlotte doit lui apporter en dot la principauté de Tarente et d’Altamura. Sur ces entrefaites, on apprend la mort soudaine de Charles VIII. Le mariage aragonais finit par se défaire, l’honnête roi Frédéric ne pouvant se décider à donner sa fille chérie à un prêtre fils de prêtre. Alors survient Louis XII qui va dissiper cet a liront en comblant les vœux de César et de son père.

Louis XII, je l’ai dit, était infiniment pressé d’obtenir du Saint-Siège les facilités nécessaires pour pouvoir répudier Jeanne de France et épouser Anne de Bretagne. De son côté, César, bien que voulant à tout prix abandonner sa situation de cardinal, était « follement attaché à son titre espagnol de Valence. » Pour se dédommager presque jusque dans les mots, suivant l’expression d’Yriarte, on érige en duché ; le comté français de Valence, de Valentinois, et on lui en donne l’investiture. Ainsi, de cardinal espagnol, il devient duc français avec le même titre. Par d’autres ordonnances royales du même Blois d’août 1498, on lui donne encore le comté de Diois, voisin du Valentinois, et la châtellenie d’Issoudun, plus le commandement d’une compagnie de cent lances avec vingt mille livres de pension, plus six mille livres sur le péage du Rhône pour les transports de sel et de vin. En même temps, il est invité à venir en France. Enfin, — honneur suprême ! — pour venger l’affront aragonais, le Roi s’engage à lui faire épouser une autre princesse, celle-là française, qui se nomme Charlotte d’Albret. Donc, le jeune défroqué se prépare à venir dans le beau royaume de saint Louis, chargé des dons de la munificence romaine si impatiemment espérés et attendus. Il apporte, cadeau précieux entre tous, les dispenses pontificales signées dès septembre et qui vont permettre à Louis XII d’épouser la veuve de son prédécesseur dès que le procès en répudiation de l’infortunée Jeanne aura été plaidé et jugé ; il apporte encore