seront une fois de plus comme elles l’ont fait jusqu’ici, sans agitations dangereuses et sans bruit. Il est vrai que les pouvoirs d’un président américain sont plus étendus que ceux d’un président français : le premier est vraiment le chef du pouvoir exécutif, tandis que le second, beaucoup plus par suite de la tradition qu’on a laissée s’établir que par une stricte application de la loi constitutionnelle, s’est réduit à un rôle figuratif ; mais plus le pouvoir est grand, plus il aurait été sage d’accélérer le mouvement électoral. Chez nous, tout se passe en un jour ; il semble au contraire qu’en Amérique on ait prolongé les délais et multiplié les étapes comme à plaisir. En ce moment ce plaisir n’est pas sans mélange de quelques désagrémens. Les ressorts de la vieille constitution américaine sont secoués par une tourmente qui menace de les faire craquer. A l’exemple de quelques autres, cette constitution est en train d’évoluer vers des fins nouvelles qui échappent aux yeux les plus perspicaces et qui seront ce qu’il plaira à Dieu.
Le danger de ces campagnes présidentielles est encore augmenté par la fréquence de leur renouvellement. En France, le président de la République est élu pour sept ans, aux États-Unis il ne l’est que pour quatre. Comme si on avait senti qu’il y avait là une aggravation d’un inconvénient manifeste, l’habitude s’était établie de réélire une fois, — une fois seulement, — le président de la République, ce qui portait à huit ans la durée effective de ses pouvoirs. Ce n’était sans doute qu’un usage ; encore a-t-il donné lieu à plus d’une exception ; mais, depuis quelque temps, il semblait prendre la force d’une tradition. M. Roosevelt a rompu avec cette tradition comme avec beaucoup d’autres. Dans son impatience de revenir aux affaires, il n’a pas consenti à y laisser M. Taft pendant huit ans, et dès l’approche de la première échéance, il a posé sa candidature avec fracas. Cette candidature elle-même était une nouveauté, ou plutôt une innovation constitutionnelle. S’il est dans la tradition, depuis Washington lui-même, qu’un président de la République peut être élu deux fois, jamais il ne l’a été une troisième, et M. Roosevelt avait si bien, autrefois, le sentiment qu’il devait en être ainsi qu’en posant sa deuxième candidature, il avait formellement annoncé que ce serait la dernière. Il a depuis équivoque sur cette promesse en disant qu’il n’avait parlé, pour l’écarter, que d’une troisième candidature qui succéderait sans interruption à la seconde, mais qu’il ne s’était pas engagé pour un avenir indéterminé. Si j’ai dit, a-t-il expliqué, qu’après une seconde tasse de café je n’en prendrai pas une troisième, cela signifie que je ne la boirai pas immédiatement, mais non pas que je n’en