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elle est malheureusement dispersée dans diverses collections, dont celle du vicomte Matsudaira. Un portrait du poète Minamotono Shitago appartenant à M. Morrison semble s’y rattacher. Nobuzane a fait de visibles efforts pour bien individualiser les images des grands personnages qu’il représente et se rapprocher de la réalité, mais les procédés dont il disposait ne lui permettaient qu’imparfaitement d’atteindre ce but. Il fallut l’influence Song de la seconde partie de l’ère de Kamakura (fin du XIIIe et commencement du XIVe siècle) pour mener à son apogée l’art du portrait.

Cette époque nouvelle est marquée par la pénétration réciproque des écoles. L’influence de celle des Tosa sur les peintres des autres lignées est particulièrement marquée : elle absorbe, pour ainsi dire, en elle toutes les autres écoles à tendances yamatisantes de l’époque. C’est ainsi que le bonze En-i, d’abord élève de Takuma, se montre surtout disciple de Tosa dans sa « Vie du prêtre Ippen, » exécutée en 1299 (Kokka, n° 245, octobre 1910). La façon dont il groupe ses personnages et le mouvement qu’il sait mettre dans les scènes représentées le rapprochent même parfois des premiers maîtres de Yamatoye. Mais la grande originalité de cette œuvre comme de tout un groupe d’autres analogues, (Vie de Hônen Shônin, un des fondateurs de la secte Jôdô, par Tosa Yoshimitsu, de la fin du XIIIe siècle ; illustration du Kasuga gongen-genki dont l’auteur principal fut Takakane au commencement du XIVe siècle) consiste dans l’immense progrès accompli par le paysage.

On remarquera que tous les makimonos que nous venons de citer appartiennent à une série spéciale : celle des légendes religieuses. Les édificateurs de temples se proposèrent sans doute pour but de démontrer aux fidèles la raison de la construction de ceux-ci, en faisant intervenir la divinité dans le choix de leur emplacement. Dans de telles œuvres, la nécessité de la description du site amena le peintre à donner une plus grande importance au paysage. Son étude poussée, beaucoup plus loin qu’elle ne l’avait jamais été, fut d’ailleurs facilitée par les modèles chinois Song qui se répandaient de plus en plus au Japon en cette fin du XIIIe siècle. Ces derniers étaient nettement caractérisés par leur recherche d’une simplicité voulue et leur emploi des teintes légères en opposition complète avec les enluminures épaisses des maîtres de Yamatoye de la période précédente.