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encombrans et que vous seriez ravie de nous voir partir. Cela ne tardera pas, allez.

— Oh bien ! par exemple, commença l’intrépide tante.

— Qu’est-ce que tu dis ? s’écria Jérôme en soulevant ses lunettes bleues, pour mieux voir son fils…

— Je dis que nous n’allons pas nous éterniser à Saint-Chartier. Je ne parle pas pour vous, mon père, bien entendu.

— A la bonne heure ! Moi, je me sens très bien ici. Et je ne me trouve pas encombrant. Qu’est-ce que tu en dis, Anna ?…

— Oh ! moi, Jérôme, tu penses bien…

Les mots ne lui venaient pas. Ses yeux seuls sortaient de sa tête.

— Enfin, tante, reprit Maxime, ayez encore quelques jours de patience. Rolande et moi avons comploté d’emmener mère faire une grande tournée en auto…

La tante Anna, ne sachant que dire, gloussait par contenance…

— En voilà une idée, dit Jérôme en haussant les épaules et en se replongeant dans son assiette.

À ce moment, Ernestine rentra avec une enveloppe qu’elle porta à Maxime. Au dos, il lut : « Étude de Me Bourin, notaire à Saint-Chartier, Indre. » Il l’ouvrit d’un doigt rapide. Deux lignes seulement, d’une toute petite écriture, au milieu de la page. L’encre était à peine sèche, et les mots portaient encore des parcelles de poudre bleue :

« Monsieur,

« Vous êtes prié de vous présenter à mon étude le plus tôt qu’il vous sera possible. Affaire urgente.

« J’ai l’honneur de vous saluer.

« Bourin. »

et en bas, cette indication précise :

« M. Baroney (Maxime), chez Mme Anna Bouquet, au Château-Neuf. »

Maxime froissa brusquement le papier en maugréant :

— Oh ! il m’embête, celui-là !

Rolande interrogeait son frère du regard. Alors Maxime lança le nom de son correspondant, sans détail :

— Bourin.

D’un œil soupçonneux, Jérôme avait suivi tout le manège de son fils. À ce nom, il s’écria :