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par les indigènes. Aujourd’hui, le voyage se fait en chemin de fer, en deux jours et deux nuits, aussi facilement qu’en Europe.


I

Arrive à Marseille par le rapide de nuit, je m’y embarquai le 22 juillet 1911 à midi précis, par une température écrasante de 36° à l’ombre que je ne retrouvai pas même en Afrique. La côte orientale d’Afrique est desservie par plusieurs lignes de navigation, et la concurrence qu’elles se font se traduit par le luxe et le confort de leurs paquebots. De Marseille partent les bateaux de la ligne française des « Messageries Maritimes, » ceux de la ligne anglaise Union and Castle, dont le port d’attache e.st Southampton, ceux de la ligne allemande Deutsche Ost Afrika, dont Hambourg est le port d’attache. On peut aussi prendre à Gênes la ligne italienne ou à Trieste celle du Lloyd autrichien. La durée de la traversée de Marseille à Mombasa varie entre dix-sept et dix-neuf jours, et dépend de l’état de la mer dans l’océan Indien, où la mousson souffle d’avril à octobre.

Le 10 août, dix-neuvième jour de navigation, par une matinée brumeuse, nous sommes en vue de la côte orientale d’Afrique. A huit heures du matin, nous entrons dans la baie de Killindini-Mombasa. Il pleut, quoique le mois d’août passe pour être dans la saison sèche. Mais il paraît que cette année la saison des pluies se prolonge sous l’influence d’une mousson exceptionnellement forte.

Et nous voici dans cette baie chantée par Camoëns dans son immortelle épopée des Lusiades. Sur ses rives éblouissantes de verdure équatoriale se balancent les panaches des cocotiers, très vigoureux dans cet air humide et lourd, dans cette atmosphère de serre chaude qui me rappelle celle de Ceylan ou de Java.

Nous jetons l’ancre à 500 mètres de la terre, et le bateau est aussitôt entouré de chaloupes dont les rameurs sont de vigoureux noirs aux membres bien musclés. C’est par une pluie battante que je débarque devant les bâtimens de la douane de l’Afrique orientale anglaise, à 4 600 milles de Marseille. C’est un Hindou qui procède à la visite de pure forme de mes bagages. Sur ma déclaration que je n’ai ni armes, ni munitions, pas même un revolver, il me dispense d’ouvrir mes malles. Ainsi, dès le seuil de l’Afrique, l’invasion du continent noir par