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AUX SOURCES DU NIL
PAR
LE CHEMIN DE FER DE L’OUGANDA

Selon Ampère, après le plaisir de voyager, le plus grand est de raconter ses voyages ; mais le plaisir de celui qui raconte est rarement partagé par celui qui écoute ou qui lit. J’espère pouvoir, sinon le charmer, tout au moins l’instruire en le conduisant au cœur du continent noir qui, hier, encore, était le continent mystérieux.

Quand Speke découvrit, en 1858, le lac Victoria, qui donne naissance au Nil, quand Stanley explora ses rives vingt ans après, l’un et l’autre eussent été bien étonnés si on leur avait prédit qu’au début du XXe siècle, le voyageur qui s’embarquerait à Marseille pourrait atteindre en trois semaines les bords de la grande mer intérieure de l’Afrique. Depuis que le rail franchit la contrée immense qui s’étend entre Mombasa, sur l’océan Indien, et Kisoumou, sur le Nyanza, on peut gagner l’Afrique centrale en moins de jours qu’il ne fallait de mois à l’époque, dont nos contemporains se souviennent, des voyages en caravane le long de la vallée du Nil. Joseph Thomson, le premier Européen qui entreprit, en 1883-1884, de gagner le Nyanza en partant de la côte orientale d’Afrique, arriva au but en quatre mois, et, à cette époque si récente, ce record pouvait encore passer pour une remarquable prouesse. Depuis lors, de nombreux voyageurs sont partis de Mombasa vers l’intérieur du continent noir pour ne plus jamais revenir, succombant aux fatigues, aux fièvres, aux privations, lorsqu’ils n’étaient pas dévorés par les fauves ou massacrés