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Page:Revue des Deux Mondes - 1912 - tome 12.djvu/31

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situation[1] ! » Cette insistance est en pure perte, et la mollesse de Marie-Antoinette est dénoncée avec aigreur par l’ambassadeur impérial : « Si la Reine, écrit-il[2], mettait un peu de suite dans ses démarches, tout réussirait ici presque sans obstacle. Mais je suis loin d’obtenir une conduite si désirable, et Votre Majesté ne doit nullement craindre que son auguste fille se mêle des affaires de l’Etat de manière à se compromettre ! »


Pour secouer l’indolente princesse et l’enhardir à de nouvelles démarches, au risque de subir une nouvelle rebuffade, il fallut l’événement qui, en comblant les vœux du Roi et de la nation tout entière, augmentait du même coup l’importance de la Reine et son crédit auprès de son époux. Dans le courant d’avril apparaissaient des signes de grossesse ; Louis XVI et ses sujets frémissaient à l’espoir d’avoir bientôt un héritier du trône. Cette circonstance, connue à Vienne, y déchaînait un redoublement d’insistances. L’effet en fut assez promptement sensible. Presque chaque semaine, à présent, la Reine mande auprès d’elle soit Maurepas, soit Vergennes, et quelquefois les deux ensemble, pour causer avec eux de « l’affaire de Bavière. » Son langage, néanmoins, témoigne encore de quelque hésitation. Elle n’ose réclamer formellement l’approbation de la politique impériale, l’adhésion sans réserve aux annexions de territoires ; elle se borne à souhaiter, en cas de guerre avec la Prusse, le concours, pour l’Empire, d’un corps d’armée français. « J’ai fait venir MM. de Maurepas et de Vergennes, écrit-elle le 19 avril à sa mère, je leur ai parlé un peu fortement, et je crois leur avoir fait impression, surtout sur le dernier. Je compte leur parler encore, peut-être même en présence du Roi[3]. »

Voici comment cette entrevue est racontée par l’abbé de Véri, qui tient sa version de Maurepas : « La Reine[4]convia MM. de Maurepas et de Vergennes et leur dit qu’elle désirait que l’on fit quelque démonstration publique en faveur de l’Autriche. M. de Maurepas fit voir qu’une démonstration publique devient aisément un engagement de guerre. Il se rejeta sur la volonté du Roi ; sur quoi, la Reine fit plusieurs gestes de tête, signifiant que la volonté du Roi n’était, à ses yeux, que celle de

  1. Lettre du 14 mars 1778. — Correspondance publiée par d’Arneth.
  2. Lettre du 20 mars 1778. — Ibidem.
  3. Lettre du 20 mars 1778. — Ibidem.
  4. Journal de Véri. — 22 avril 1778.